Elections présidentielles
Parce que notre système de santé et notre schéma conventionnel sont des « champs de ruines », parce que les médecins libéraux n'en peuvent plus d'être « méprisés » et parce que « de la destruction doit naître la reconstruction », la CSMF a décidé d'occuper le terrain jusqu'à la fin des échéances électorales en cours.
En proposant « 10 actions pour redonner confiance aux médecins », à engager dans les « six mois » après les législatives, la première organisation de praticiens libéraux, qui n'a cessé de s'opposer depuis sept ans aux gouvernements, veut se repositionner en tant que syndicat « responsable, constructif et conventionniste ». Initialement, admet le Dr Michel Chassang, nouveau président de la CSMF, l'objectif était, comme en 1995, d'envoyer cette plate-forme aux deux derniers candidats qualifiés pour le second tour de la présidentielle. Mais « le séisme électoral a changé la donne ». Désormais, ajoute-t-il, « il n'y a plus de suspense en ce qui concerne le président de la République » et ce sont les élections législatives qui marquent le « rendez-vous décisif qui conditionne notre avenir ». Les recettes de la CSMF s'adressent donc en priorité aux « grandes formations » républicaines appelées à gérer « la politique de la France, notamment en matière de santé ».
Pour la CSMF, deux mesures immédiates s'imposent pour restaurer la confiance. L'une s'adresse aux médecins de famille, l'autre aux spécialistes. Il s'agit, d'une part, de la revalorisation des actes de base des généralistes (C à 20 euros, V à 30 euros) et, d'autre part, de la suspension des pénalités que subissent les spécialistes en secteur I (surcoût de charges sociales) dans le cadre du règlement minimal conventionnel.
Au-delà de ces gestes d'apaisement, la Confédération suggère en premier lieu une batterie de mesures qui exigent des aménagements législatifs ou réglementaires.
Certaines sont relativement consensuelles. Ainsi, la « fixation d'un objectif prévisionnel non opposable des dépenses défini en fonction des besoins au niveau régional » rejoint peu ou prou les propositions des partis susceptibles de remporter les législatives. Tous ont, en effet, condamné récemment les effets pervers et l'inefficacité de la maîtrise comptable, et souligné la nécessité de régionaliser davantage la politique de santé.
Autre exigence de bon sens : la « suppression des comités médicaux régionaux » (CMR) souvent décrits comme des tribunaux d'exception par les médecins et qui, de toute façon, ne fonctionnent plus.
La CSMF réaffirme au passage son hostilité absolue aux « lettres clés flottantes », système de régulation que le gouvernement Jospin avait prévu de maintenir en l'absence de convention, mais aussi à tout processus de « conventionnement individuel » (la loi qui réforme les conventions prévoit des engagements facultatifs individuels).
Plus anecdotique, le syndicat exige la parution du décret d'application concernant le « partage de l'information », autrement dit, la transmission des données médicales anonymisées aux unions régionales, demande qui remonte à 1994. La Confédération plaide également pour le rétablissement du « dossier de suivi médical de synthèse » coordonné par un généraliste ou un pédiatre, qui avait, là aussi, été instauré sans succès en 1994. Enfin, deux mesures relativement indolores concernant le médicament sont envisagées : la non-généralisation des ordonnances sécurisées, que la CSMF propose de réserver aux prescriptions de toxiques, et la suppression du droit de substitution des pharmaciens sans l'accord préalable du médecin.
Supprimer l'option médecin référent
Dans le domaine conventionnel, la CSMF veut, sans surprise, négocier une « convention médicale unique » mais « avec des volets spécifiques éventuels ». Cette future convention doit, selon la Confédération, jeter les bases d'une « maîtrise médicalisée » des dépenses de médecins de ville, qui paraît toutefois bien difficile à instaurer à court terme, en l'absence du codage des actes et des pathologies. « C'est une direction que nous indiquons », observe ici le Dr Chassang. Le syndicat propose de supprimer l'option médecin référent, qui n'a convaincu que quelque 10 % de généralistes et environ un million de patients.
Enfin, pour rémunérer les actes médicaux « à leur juste valeur », la CSMF propose, comme l'avait suggéré, dès mai 2001, le groupe du « G7 » (1), d'intégrer dans la valeur de l'acte médical proprement dit « les coûts liés aux tâches administratives » et la formation médicale continue. Pour mémoire, le « G7 » avait proposé une consultation de médecine générale fixée à « 30 euros » intégrant l'acte médical, les charges, les tâches administratives et la FMC. Une refonte de la nomenclature est également encouragée, notamment pour « promouvoir les actes de chirurgie générale » et distinguer les différentes consultations « suivant leur contenu ».
Six mois ou « jamais »
Les intentions de la CSMF dans le domaine de la permanence des soins ou de la sécurité sont moins novatrices. La « suppression de l'article 77 du code de déontologie » (obligation de garde) est envisagée à demi-mot par l'Ordre. Quant au traitement de l'insécurité, la Confédération se contente de réclamer des « moyens pour assurer la protection du médecin exposé, notamment en visite ».
Enfin, on retiendra quelques déclarations d'intention pour « préserver » l'hospitalisation privée, « adapter harmonieusement » la démographie en fonction des besoins régionaux, « garantir » la qualité des soins ou encore « préserver la retraite du médecin ».
Last but not least, le premier syndicat médical préconise une réforme globale du statut fiscal et social du médecin, qui comporte notamment un « allégement » de la taxe professionnelle des professionnels libéraux employant moins de cinq salariés, l'assouplissement de l'application des 35 heures dans les cabinets médicaux ou encore une réduction du taux de la TVA sur les équipements médicaux. « Tout est à reconstruire, répète le Dr Chassang. Si on ne le fait pas dans les six mois, on ne le fera jamais. »
Le « G7 » est un groupe de travail qui réunit trois organisations de médecins libéraux et quatre confédérations de salariés.
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