A la suite du signalement de 14 TIAC, en décembre dernier, à Paris et dans quatre départements français, ainsi que de 200 cas de gastro-entérites aiguës en Italie, rapportés par le Réseau européen des alertes d'origine alimentaire, chez des consommateurs d'huîtres en provenance de l'étang de Thau, l'enquête menée par l'InVS et publiée aujourd'hui par le « Bulletin épidémiologique hebdomadaire »* confirme l'hypothèse de départ : une contamination commune par des huîtres de l'étang de Thau. Ces coquillages provenaient de trois sites contigus du bassin de Thau, un bassin qui, à la suite de précipitations exceptionnelles et de crues les 10 et 11 décembre 2002, avait été pollué par les eaux de la station d'épuration et des postes de prélèvements du secteur.
Deux études épidémiologiques ont été menées conjointement, l'une parmi le personnel d'un établissement administratif parisien où des huîtres en provenance de l'étang de Thau avaient fait l'objet d'une distribution, l'autre auprès de cas déclarés au même moment par les DDASS de quatre départements.
Sur les 58 participants à la première étude, 36 avaient consommé des huîtres et 21 avaient présenté des signes cliniques caractéristiques : douleurs abdominales (76 %), diarrhée (76 %), suivies par les nausées (62 %), les vomissements (43 %) et la fièvre (9,5 %). Durée médiane de la maladie : 1,5 jour. Les huîtres étaient le seul aliment commun aux personnes intoxiquées.
La seconde étude a révélé des symptômes très similaires chez 69 personnes, toutes également consommatrices d'huîtres en provenance de différents sites contigus de l'étang de Thau (Bouzigue, Marseillan et Mèze).
Les analyses microbiologiques ont détecté des Norovirus sur 12 prélèvements de selles effectués sur des patients de cinq TIAC. Des Norovirus ont également été mis en évidence dans trois échantillons d'huîtres, une même souche étant identifiée dans les huîtres en provenance de deux sites de l'étang de Thau. Dans les selles étudiées, trois souches différentes dont une identique à celle identifiée dans les huîtres ont été détectées.
Ces résultats, souligne le « BEH », « suggèrent que les coquillages étaient multicontaminés et ne remettent pas en cause l'imputabilité des huîtres dans les TIAC, car il existe une grande diversité de souches de Norovirus circulantes ».
Les symptômes observés au cours des différentes TIAC, de surcroît, sont tous très évocateurs d'une étiologie virale. Le réservoir principalement humain des Norovirus, le mode de transmission oro-fécal associé à une faible dose infectante et une importante résistance dans l'environnement leur confèrent un potentiel épidémique important.
Les épidémiologistes soulignent d'ailleurs qu'en raison de l'importante sous-déclaration des TIAC en France, en dépit de l'obligation de signalement, il est probable que le nombre de ces toxi-infections alimentaires liées à la consommation des huîtres de l'étang de Thau ait été supérieur au nombre des TIAC identifiées, en France comme en Italie et probablement dans d'autres pays d'introduction.
Le « BEH » rappelle que les autorités sanitaires avaient demandé à la mi-décembre aux conchyliculteurs de placer leurs coquillages dans les bassins de purification, des contamination bactériennes ayant été observées à la suite des débordements des stations d'épuration et des postes de prélèvement ; la mesure n'a pu être que partiellement appliquée, faute d'équipements suffisants. Fallait-il alors que l'interdiction et le retrait des lots de coquillage à la vente et à la consommation soient décidés ? Les auteurs, sans répondre expressément, estiment que « des mesures de prévention devraient être renforcées à tous les niveaux de la production et de la consommation ».
* « BEH » n°38/2003, p.177, étude dirigée par Delphine Barataud (InVS).
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