THEATRE
PAR ARMELLE HELIOT
Un spectacle, on le sait, est un organisme vivant qui évolue, se transforme, se moire de changeantes couleurs. Cette « Bérénice » montée avec probité mais quelques naïvetés aussi, il faut le dire, l'été dernier à Perpignan puis Avignon, a trouvé sa densité. En extérieur, tout flottait et le décor sans grâce, les costumes peu seyants, ligotaient les interprètes. Pourtant les acteurs étaient à leurs personnages : Didier Sandre, Titus déchiré, profond, Kristin Scott-Thomas, Bérénice à léger accent, un peu appliquée mais sensible, Lambert Wilson, Antiochus désenchanté.
C'est Lambert Wilson qui signe cette mise en scène. Il voit, il l'a dit, dans l'intrigue magnifique, une histoire de ménage à trois moderne et sado-masochiste - déclaration donnée en substance. Et il rêve, visiblement, en transposant l'action, de donner une coloration évoquant « Les Damnés » de Visconti à la représentation.
Les comédiens n'ont que peu de points d'appui : une grande table sinistre, une chaise, un lit (skaï noir et tubulures d'acier). Mais dans la paix de la grande salle de Chaillot, au moins peuvent-ils incarner cette langue, ce que fait magnifiquement Didier Sandre qui sait que Racine est d'abord verbe, par-delà psychologie, tourments du coeur, raison d'Etat, retournements de l'action. Son jeu tout en irisations délicates est très maîtrisé et sensible.
Avec la touchante ferveur de l'étrangère - ce n'est pas sa langue natale -, Kristin Scott Thomas - formée en partie rue Blanche - donne aux vers leurs précisions, leur juste balancement. Elle est attentive aux liaisons, elle dégage la trouble émotion de la princesse même si son timbre n'appartient pas consubstanciellement au registre tragique.
Robin Renucci qui les a rejoint réussit dans un mouvement délié à imposer un Antiochus blessé et digne très convaincant. Le Paulin de Michel Baumann est excellent.
Bref, ce spectacle a trouvé sa cohérence. Par les acteurs.
Théâtre national de Chaillot, salle Jean-Vilar, à 20 h 30 du mardi au samedi, en matinée le dimanche à 15 heures (01.53.65.30.00). Jusqu'au 21 octobre.
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