Pour le TGI de Bordeaux, l’urgentiste rwandais accusé de génocide est présumé innocent

Publié le 08/11/2011

Une association a été reconnue coupable de non-respect de la présomption d’innocence, ce mardi, par le tribunal de grande instance de Bordeaux, après que ses membres ont publiquement accusé un médecin rwandais d’avoir participé au génocide de 1994 au Rwanda.

La plainte du Dr Sosthène Munyemana faisait suite à une manifestation organisée le 30 janvier 2010 par l’association Cauri devant l’hôpital Saint-Cyr de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), où il est médecin urgentiste depuis 2001. Les manifestants avaient brandi des pancartes indiquant « Pas d’asile pour les génocidaires » et distribué des tracts visant une « personne qui a pu en envoyer (d’autres) par dizaines à la mort ». Des membres de l’association avaient également tenu dans le journal « Sud Ouest » des propos similaires.

Le jugement observe que « les publications au sujet des faits, exceptionnels par leur horreur, qui se sont déroulés au Rwanda, restent soumises au principe de la présomption d’innocence [qualifiée ailleurs dans le jugement "d’exigence fondamentale"] alors même que les exigences de vérité et celles des historiens justifieraient que la justice puisse enfin se prononcer sur l’imputabilité de ces faits ».

Le tribunal, notant que le médecin n’a pas subi de préjudice matériel puisqu’il a gardé son emploi, a limité la réparation à un encart dans « Sud Ouest » rendant compte du jugement et au remboursement au médecin de 1 500 euros de frais de justice, lui refusant les dommages et intérêts qu’il réclamait. Cette décision a néanmoins été considérée comme « satisfaisante » par l’avocat du médecin rwandais, Me Jean-Yves Dupeux, car, selon lui, « c’est la première fois qu’un tribunal réagit de cette manière en réaffirmant le grand principe de la présomption d’innocence ».

L’ancien médecin de Butare (sud du Rwanda) est fiché par Interpol pour génocide et crime de guerre depuis 2006, à la suite d’un mandat d’arrêt international émis par Kigali. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux avait rejeté en octobre 2010 sa demande d’extradition. Sosthène Munyemana est également visé par une information judiciaire ouverte en 1995 à Bordeaux et transférée en 2001 à Paris. Il a dans cette procédure le statut de témoin assisté.


Source : lequotidiendumedecin.fr