« Une dinguerie », dit Pierre Vaneck et il n'a pas tort. « Une pièce sur la souffrance », dit John Malkovich et l'on se souvient alors que cet acteur, metteur en scène et désormais réalisateur, est de nationalité américaine. Il y a dans « Hysteria », pièce sous-titrée « fragments surréalistes d'une névrose obsessionnelle » - et l'on n'est pas certain qu'il s'agisse d'humour de la part de l'auteur - tous les ingrédients de pathos qui sont la traduction d'une certaine culture d'outre-Atlantique.
En France, c'est différent : si l'on vous dit qu'il y a un placard, qu'une jeune femme nue est cachée dedans, que ses dessous de soie traînent dans le bureau de Freud et que ce dernier a beaucoup de mal à expliquer à son vieil ami qui n'aime pas « Moïse et le monothéisme » ce que ces pièces (à conviction) font sur le tapis, en France on reconnaît à ces quelques classiques ingrédients, un vaudeville.
Feydeau, Labiche, Ray Cooney prennent plutôt comme héros de bons bourgeois. Pas des intellectuels essentiels, tel Sigmund Freud. Mais « Hysteria » n'est pourtant rien d'autre qu'une plaisante pièce de boulevard, montée avec de grands moyens et interprétée par de très bons comédiens : Vaneck, donc, mais aussi le merveilleux Roger Dumas, la délicieuse Marie Gillain, le très séduisant Vincent Elbaz et Véronique Attal pour quelques répliques.
L'analyse est approximative
Si on lèse une majesté en disant tout ça, c'est le metteur en scène drapé devant la presse dans la position de l'esprit clairvoyant qui n'entend que le malheur ontologique et moral de Sigmund Freud à la fin de sa vie, qui n'entend que la claque administrée au surréalisme, qui n'entend que la souffrance de l'hystérique, etc.
C'est intéressant, parce qu'il y a aussi cela dans le projet de l'écrivain et que l'entend qui le souhaite. Mais disons que c'est une pièce qui appartient à un registre particulier, plus familier du monde anglo-saxon que de notre sage rationalité qui appelle les genres. Chez nous, on n'aime pas les mélanges. Et l'on sent le public extrêmement circonspect. La farce est épaisse, l'analyse approximative.
Or, et la mise en scène ne dépasse pas ce cadre, non seulement « Hysteria » est une pièce vraiment écrite comme un vaudeville, avec sa mécanique et ses rebondissements attendus, mais elle est corsetée dans des didascalies assez discutables que John Malkovich, qui a monté déjà ce texte en langue anglaise à Chicago, prend un plaisir malin à suivre. Le public, decontenancé, rit beaucoup lorsque Freud retire son pantalon à Dali et semble, pour qui découvre la scène, le sodomiser allègrement. Une image pour vous donner une idée du niveau de la représentation.
Reste qu'il s'agit d'un rêve du Freud au bord de passer, reste que vous verrez le décor se gondoler et se recomposer, reste que c'est très bien joué par un Pierre Vaneck ironique et douloureux, un Roger Dumas moëlleux et sensible, un Vincent Elbaz cocasse et très présent, une enjôleuse et touchante Marie Gillain. Une dinguerie. Vous êtes prévenus...
Théâtre Marigny-Robert Hossein, à 20 h 30 du mardi au vendredi, en matinée le samedi à 16 h 30 et en soirée à 21 heures, le dimanche à 16 heures (01.53.96.70.00 et Le Quotidien Spectacles 01.53.35.35.25). Durée : 2 h 30 entracte compris. Le texte de la pièce est publié par «L'Avant-Scène Théâtre».
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