Jusqu'à présent, la plupart des animaux transgéniques ont été obtenus par micro-injection d'ADN dans le pronucléus mâle du zygote. Outre son coût, la méthode présente l'inconvénient d'un rendement médiocre, de l'ordre de 1 %. Les auteurs italiens proposent donc une alternative à cette technique.
Depuis quelques années déjà, on sait que le spermatozoïde est capable de fixer et d'internaliser des fragments d'ADN présents dans le milieu. Diverses expériences ont été effectuées chez la souris, montrant que le spermatozoïde peut ainsi intégrer un transgène et, outre son rôle fécondant, jouer le rôle de vecteur de transgenèse. C'est cette technologie qui a été mise en oeuvre pour obtenir des porcs exprimant le gène humain DAF (Decay Accelerating Factor), facteur dont l'expression prévient le rejet d'une greffe porcine chez le primate non humain.
La descendance aussi
Les spermatozoïdes d'un porc ont donc été incubés en présence d'une construction génétique comportant le gène hDAF, puis utilisés, lors de huit cycles d'insémination artificielle, pour féconder 15 truies ; 93 pourceaux ont été obtenus ; 53 d'entre eux portaient la séquence hDAF et le gène était transcrit chez 34 animaux. Quant à la protéine, elle a été recherchée dans le coeur de 18 animaux et retrouvée dans 15 cas.
En outre, 10 animaux exprimant l'ARNm hDAF se sont reproduits, donnant naissance à 205 pourceaux. Une proportion comprise entre 20 et 50 %, selon les portées, avait effectivement reçu le transgène.
Les conséquences immunologiques de l'expression de hDAF ont été testées sur des cellules et des tissus endothéliaux d'animaux transgéniques, soumis à l'action des anticorps et complément humain. L'expression de la protéine s'est effectivement révélée associée à un phénotype de résistance immunologique.
Entre ce test in vitro et la xénogreffe, le chemin est évidemment encore long.
D'abord, parce que de multiples gènes devraient sans doute être introduits - et, probablement, d'autres éteints -, pour aboutir à des organes n'entraînant pas de rejet in vivo. Ensuite, parce que la transgenèse ne franchit pas d'autres obstacles majeurs à la xénogreffe, en particulier le risque de transmission d'un virus animal à l'homme.
Le long chemin avant les xénogreffes
Dans l'immédiat, même si l'on parle de xénogreffe, la technique décrite ne pourrait avoir qu'une seule application : la production de troupeaux transgéniques. Ce que les auteurs finissent d'ailleurs par admettre : « On peut espérer que la possibilité de produire des porcs transgéniques de manière efficace et reproductible ne permettra pas seulement de créer des animaux destinés à la xénogreffe, mais aussi de mettre en place des stratégies permettant d'accéder aux promesses attendues du bétail transgénique. »
On notera simplement qu'il n'est pas certain qu'au-delà du cercle des équipes concernées le bétail transgénique soit exactement ce qu'il est convenu d'appeler un espoir, ni que les promesses de lendemains qui chantent, vu leur passé, aient encore beaucoup d'avenir.
M. Lavitrano et coll. « Proc Natl Acad Sci USA », édition on line avancée.
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