P OUR la première fois, les personnes atteintes de la polyarthrite rhumatoïde et les médecins rhumatologues lancent ensemble un cri d'alarme. Ou plutôt un appel aux pouvoirs publics, afin que les quelque 15 000 malades résistant aux traitements de fond traditionnels puissent avoir accès à une nouvelle classe de médicaments, les anti-TNF, notamment, considérée comme une ressource thérapeutique efficace dans la majorité des cas.
Entre 0,5 et 1 % de la population adulte est touchée par la polyarthrite rhumatoïde. En France, on estime entre 200 000 et 400 000 le nombre de polyarthritiques diagnostiqués. Pour l'ensemble de l'Europe, on situe le nombre de personnes atteintes entre un et trois millions. Globalement, la polyarthrite rhumatoïde survient entre 15 et 65 ans chez les personnes des deux sexes. Néanmoins, cette maladie touche en priorité les femmes, dans 75 % des cas. Selon une évaluation, réalisée par l'Association des rhumatologues praticiens hospitaliers à temps plein (ARPH)* et l'Association française des polyarthritiques (AFP), 14 % des malades ont été estimés par leur rhumatologue « réfractaires à tout traitement de fond » et nécessitent un traitement anti-TNF, mais 1 000 d'entre eux seulement y ont accès. Dans la plupart des cas, c'est seulement au bout de sept ou huit ans de maladie que les traitements anti-TNF sont prescrits. Et pourtant ! Ces traitements, administrés en milieu hospitalier, améliorent l'état fonctionnel du malade et freinent considérablement l'évolution de la maladie. Le Conseil national de rhumatologie (CNR) rapporte le cas d'un malade, traité depuis trois ans, dont la maladie n'a pas évolué. Selon l'évaluation citée précédemment, « en plus des traitements à poursuivre, près de 3 000 traitements par infliximab restent à instituer en France en 2002, tous CHU et CHNU confondus. Ce qui représente un budget annuel d'environ 200 millions de francs ». En effet, le coût par an et par personne d'un traitement s'élève à 70 000 F environ, l'équivalent d'une trithérapie.
C'est là que le bât blesse. A la suite d'une réunion au ministère de la Santé avec des représentants de l'AFP et du CNR, les pouvoirs publics ont accepté de porter à 120 millions (au lieu des 50 prévus) le budget que les hôpitaux doivent consacrer à l'accès aux anti-TNF au second semestre 2001. Or, selon le Dr Xavier Puéchal, représentant du CNR, « 120 millions permettent de traiter avec les anti-TNF environ 1 500 malades par an ». Pour le reste, à savoir la budgétisation des fonds nécessaires pour 2002 et l'inscription de la polyarthrite rhumatoïde au rang des priorités nationales de santé publique, les associations de malades refusent de s'en tenir à des « déclarations d'intention ».
« Ségrégation thérapeutique »
« Ras-le-bol de s'entendre dire que cette maladie n'est pas mortelle, lance, de son côté, Christian Labes, secrétaire général de l'AFP. Comment accepter que la polyarthrite rhumatoïde, une maladie si invalidante, fasse l'objet d'une ségrégation thérapeutique de la part des pouvoirs publics ? » Selon les associations de malades et les médecins, les pouvoirs publics risquent de contraindre les rhumatologues hospitaliers à favoriser cinq malades parmi soixante-quinze candidats nécessitant des traitements innovants.
« Comment supporter le choix d'un malade plus qu'un autre ? Notre maladie comprend au moins 300 000 malades et tous ont le droit d'espérer pouvoir se soigner et surtout moins souffrir », écrit M. A., de Tourves. « Cela fait vingt et un ans que je souffre. Tous les traitements de fond ont échoué. J'ai été opéré de l'estomac et huit fois des articulations, et ce n'est pas fini, témoigne M. B., d'Alès. Qui mérite de souffrir ou de moins souffrir ? »
* L'ARPH fait partie du Conseil national de rhumatologie (CNR).
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