Certaines révolutions se produisent à bas bruit. Elles ouvrent pourtant, l’air de rien, une nouvelle ère. Dans la saga tumultueuse du médicament en France, la chronique retiendra la date du 2 octobre. Ce jour-là, l’évaluation médico-économique, brandie longtemps comme une menace virtuelle, est devenue une réalité. Certes, la Haute Autorité de santé se méfie des mots qui fâchent. Son président, Jean-Luc Harousseau, évoque plutôt le concept d’efficience. Mais sous l'euphémisme, un sport national pratiqué par toutes les administrations hexagonales, le tabou est désormais levé. Outre les données de la science, le médicament fera l’objet d’une évaluation économique. Cette mesure a été programmée par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 qui ne s'arrête pas seulement à fixer le taux de l’Ondam. Les premiers avis sont attendus en janvier 2014.
Certes, tous les nouveaux produits ne seront pas soumis à ce double couperet. Il sera réservé aux médicaments et dispositifs médicaux dont le chiffre d'affaires prévisionnel est de 20 millions d’euros après deux années de commercialisation. Outre ce critère quantitatif, est également mis en avant par la HAS un impact qualitatif « sur l’organisation des soins, les pratiques professionnelles ou les modes de prises en charge des malades » qui justifiera alors une évaluation de l’efficience. Pour autant, une fois les règles édictées, elles n’ont rien d’absolu ou d’intangible. La HAS prend soin de préciser qu’elle sera habilitée à les modifier selon les circonstances. Dont acte. Il n’est toutefois pas recommandé aux industriels qui déposeront un dossier d’user de la même liberté. Mais une fois la machine lancée, où placer le curseur entre l’innovation et le coût ? Aujourd’hui, au sein de la HAS, les frontières sont strictement délimitées entre la Commission de la transparence qui délivre un avis selon l'état de la science et la commission médico-économique. Qu’en sera-t-il demain ? Osera-t-on lors du prochain remaniement pousser la logique jusqu’à rattacher le ministère de la Santé à celui du Budget ? Politique fiction bien sûr quoique...
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