Tout le monde aime le médicament, ou presque : c'est le constat que l'on a pu faire à l'issue du débat organisé au palais des Congrès, lors de la Journée annuelle des amicales des médecins de Paris, sur la place du médicament dans la politique de santé et animé par le Dr Alain Marié, directeur médical du « Quotidien du Médecin ».
En effet, que des personnalités aussi diverses que Pierre-Jean Lancry, directeur de la gestion des risques à la CNAM, Jean-Pierre Cassan, président du Syndicat national de l'industrie pharmaceutique, Etienne Caniard, responsable de la Mutualité française, ou Christian Lajoux, président de Sanofi-Synthélabo-France, se retrouvent peu ou prou pour se réjouir des vertus du médicament, voilà qui est assez rare pour être noté.
Débat de bon ton, mais au cours duquel l'on a pu percevoir quelques différences d'interprétation, concernant notamment le coût de la politique du médicament pour la collectivité. Et, sur ce point, forcément, les opinions divergent. A Pierre-Jean Lancry, qui rappelait que les dépenses de médicament atteignaient 164 milliards de francs par an, soit une fois et demie les dépenses des honoraires médicaux, Jean-Pierre Cassan a répondu sur le thème des économies induites par le médicament : une personne en arrêt de travail, a expliqué le président du SNIP, et qui reprend son activité plus rapidement que par le passé grâce aux médicaments, est-ce un coût ou une économie ?
Des hospitalisations qui durent moins longtemps, qui sont même évitées, grâce à de nouveaux médicaments, est-ce une économie ou un coût ?
Il ne s'agit pas de nier l'efficacité du médicament, répond M. Lancry, mais de remarquer que ce secteur de dépenses est celui qui a le plus progressé ces dernières années, et qu'il convient donc d'y porter attention.
Des choix politiques
Ce que ne manque pas de faire d'ailleurs Etienne Caniard qui, au nom de la Mutualité, s'inquiète de cette progression, tout en reconnaissant « qu'il est indéniable que le médicament a constitué un facteur essentiel du progrès thérapeutique au cours de ces dernières années ».
Onéreux, le médicament ? Allons donc, répond Christian Lajoux, c'est oublier que la France est sans doute le pays où les prix des spécialités remboursées sont les moins chers. « Le même hypnotique vendu aux Etats-Unis vaut dix fois plus cher qu'en France », explique-t-il, approuvé en cela par Jean-Pierre Cassan, qui regrette que la France n'ait guère de politique industrielle en la matière. Plus étonnant, M. Cassan est approuvé par Etienne Caniard, qui reconnaît qu'en effet les « prix sont trop bas en France ». Mais, ajoute-t-il aussitôt, « ce phénomène est compensé par une forte consommation ». Ce qui impose, commente Pierre-Jean Lancry, que des limites soient définies pour que les dépenses ne dérapent pas d'une manière excessive. Sans doute l'objectif de 3 % fixé pour 2002 à la progression maximale du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique en France ne peut-il contenter les industriels. « D'accord, a expliqué Christian Lajoux, pour un contrôle des dépenses, mais pas à un taux de 3 % dont on sait qu'il ne peut en aucun cas être respecté. » Alors, à quel niveau le fixer ? La réponse n'est pas aisée entre les industriels qui voudraient avoir les moyens, comme ils l'affirment, de poursuivre leur croissance pour investir dans la recherche et l'innovation, et les gardiens des deniers de la protection sociale, qui veulent éviter tout dérapage des comptes. Mais « il est faux de dire aujourd'hui, a conclu Pierre-Jean Lancry, que l'on peut tout faire et tout rembourser, à n'importe quel taux, à n'importe quel prix ». D'où des choix politiques qui réjouissent rarement les industriels du médicament.
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