L'année sera décisive pour l'industrie du médicament. Invités de l'Association des cadres de l'industrie pharmaceutique (ACIP), le président du LEEM (Les Entreprises du Médicament, nouvelle appellation du SNIP), Jean-Pierre Cassan et son vice-président délégué, Bernard Lemoine, l'ont clairement indiqué : la négociation du nouvel accord-cadre entre l'industrie et le comité économique des produits de santé, représentant du gouvernement et des pouvoirs publics, sera l'événement le plus important pour l'avenir de ce secteur d'activité en 2003.
Un événement d'ailleurs d'autant plus important que cet accord-cadre, on le sait, est le texte de référence sur lequel se fonde chaque chef d'entreprise pour signer des conventions avec ce même comité.
Or, les discussions s'annoncent, sinon difficiles, du moins délicates et serrées. Entre le gouvernement qui cherche à modérer les dépenses de médicaments remboursées par la Sécurité sociale, et un secteur industriel qui, bien qu'il soit conscient de la conjoncture économique, cherche les moyens de se développer et d'investir, la compréhension n'est pas toujours de mise.
Il est vrai, a expliqué Bernard Lemoine, que « la situation économique s'annonce difficile en 2003 et la France aura du mal à respecter le pacte de stabilité européen et les critères du traité de Maastricht (texte qui impose aux gouvernements de limiter leurs déficits publics à 3 %, NDLR). De fortes tensions sociales ne sont donc pas à écarter et, dans le domaine de la santé, l'objectif des dépenses d'assurance-maladie (5,3 %) en 2003 aura bien du mal à être tenu. Tant et si bien que l'équilibre des comptes, souhaité par le gouvernement ne sera sans doute pas au rendez-vous et que le secteur du médicament pourrait un nouvelle fois être mis à contribution ».
Et c'est cette perspective que craignent les industriels aujourd'hui. Echaudés par les décisions du précédent gouvernement, ils sont prêts à croire en les promesses du nouveau qui, dans la loi de financement de la Sécurité sociale 2003, leur a octroyé une certaine liberté de prix, certes limitée, pour leurs produits innovants et a inscrit dans la même loi le principe de l'accord-cadre, ce qu'ils demandaient avec insistance depuis plusieurs années.
Pas de blanc-seing
Mais pour autant, ce n'est pas un blanc-seing qu'ils sont prêts à parapher, à l'issue des négociations avec le comité économique. « Il n'est pas question de signer une accord à tout prix, a averti Jean-Pierre Cassan. Nous somme prêts à en retarder la date, voire même à le refuser si nous n'obtenons des garanties certaines. » D'abord, sur le respect de cet accord par les pouvoirs publics, car les industriels ont encore en travers de la gorge les baisse de prix annoncées par Elisabeth Guigou en 2001, en contradiction complète, disent-ils, avec les termes du précédent accord ; ensuite, en obtenant des pouvoirs publics certaines avancées par rapport à la situation actuelle, sur le financement des innovations, la recherche, les prix, voire le commerce parallèle.
Car, même si la situation économique est difficile, il faut avancer, expliquent les responsables du LEEM. « On ne saurait, en effet, faire payer aux professionnels de santé et aux industriels, affirme Bernard Lemoine, les conséquences d'une mauvaise situation économique qu'ils n'auraient pas contribué à créer. » Ce dont convient en quelque sorte Jean-François Mattei, qui, dans un entretien avec « le Quotidien » (notre édition du 20 janvier), notait qu'il ne se tournerait vers les professionnels de santé si un déficit de l'assurance-maladie se creusait en raison de mauvaises recettes, car « ils ne portent pas, disait-il, la responsabilité du recul de l'emploi et de la récession ». Sous entendu, la situation serait différente en cas de dérapage des dépenses.
C'est même l'un des enjeux des négociations qui s'engagent sur l'accord-cadre.
On devrait d'ailleurs avoir assez vite une idée de l'état d'esprit des négociateurs qui aborderont le 11 février un sujet « très chaud » : le problème du dépôt de prix, prévu par la loi de financement de la Sécurité sociale, c'est-à-dire la liberté de prix pour les médicaments innovants. Il s'agira alors de négocier le niveau de prix acceptable par les pouvoirs publics, auquel cette liberté pourra s'exercer, en fonction du degré d'innovation des spécialités. Pas facile.
Un premier bilan des négociations pourra être tiré le 9 mars à l'issue de la synthèse des travaux qui sera alors rédigée.
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