Depuis la mise en place du tarif forfaitaire de responsabilité (TFR) il y a quelques semaines, les laboratoires pharmaceutiques ont le choix d'aligner ou non le prix de leur médicament princeps sur celui du générique correspondant : cette réforme, en effet, institue un seul tarif de remboursement pour les groupes de génériques concernés, quel que soit le prix du médicament prescrit par le médecin.
Un choix industriel conditionné par la politique internationale de l'entreprise, qui a tout intérêt à conserver sa part de marché en baissant ses prix, surtout si elle réalise l'essentiel de ses ventes sur le marché français.
« Je pense que certains laboratoires attendent encore de voir les chiffres et les résultats de cette politique avant de décider s'ils s'alignent. Car cela leur fait quand même perdre parfois jusqu'à 30 % de leur marge », explique Philippe Besnard, président du laboratoire de génériques G.GAM. Cependant, cela n'a pas empêché « septembre d'être le meilleur mois de l'année pour les génériques ».
Bien sûr, le recul est encore nettement insuffisant pour évaluer la conséquence de la politique des TFR.
Mais la pression de la concurrence est telle que les génériqueurs se hâtent d'analyser et de tirer des conclusions de la moindre variation du marché.
Si Philippe Ranty, président du groupement de génériqueurs GEMME, considérait récemment le TFR comme une « mesure contre-productive » (« le Quotidien » du 1er octobre), Philippe Besnard est plus mesuré : « Le TFR, explique-t-il, est comme une épée de Damoclès pour les pharmaciens qui sont incités à augmenter la substitution. Pour ma part, je n'ai jamais pensé qu'il tuerait le générique. On retrouve un système équivalent dans tous les pays européens. En revanche, le TFR sur tout le portefeuille de génériques d'un industriel, non ! » Conscient que les pouvoirs publics s'appuient sur le développement des génériques ( « comme contre-pouvoir à l'augmentation des prescriptions des médecins, croissance qu'ils n'arrivent pas à maîtriser »), pour tenter de combler le déficit de la Sécu, le président de G.GAM entend bien profiter de cette période de grâce pour placer ses pions tout en assurant qu'il « ne veut la guerre avec personne ».
Alors que les débats font rage autour des prix des médicaments et des marges des pharmaciens, son discours glisse insensiblement vers un discours de marque, d'image et de service ajouté - tout ce que l'on n'attend pas nécessairement de la part d'un fabricant de génériques.
Une offre globale comprenant des OTC
Si les patients sont aujourd'hui beaucoup plus réceptifs aux génériques - après les campagnes de la CNAM et du ministère de la Santé - les médecins restent des prescripteurs à convaincre, et les pharmaciens des clients à fidéliser. Aux officinaux, G.GAM entend proposer une offre complète incluant le plus vaste portefeuille possible, quitte à sortir du strict périmètre des génériques. « On ne craint pas trop l'alignement des princeps », explique Philippe Besnard, « dans la mesure où le laboratoire se présentera à l'officine avec un, deux, au maximum trois princeps alignés sur le prix des génériques, tandis que nous proposons une gamme de plus d'une centaine de produits ». Le pharmacien sera plus sensible à un laboratoire capable de lui proposer « des portefeuilles complets de produits », avec qui il pourra passer des contrats de collaboration « durables ».
Dans ces portefeuilles, G.GAM prévoit d'inclure bientôt - au premier trimestre 2004 - des médicaments OTC, une mesure dictée notamment par l'accélération des déremboursements qui font basculer un certain nombre de médicaments dans cette catégorie.
Même si le marché français des génériques n'est pas encore rentable, le président du laboratoire compte bien faire valoir la spécificité de son métier (G.GAM est une filiale de l'Allemand Hexal) pour se placer en tête du peloton à l'heure où tomberont dans le domaine public les « gros, gros produits, vers 2005-2008 ». Et pour cela, pas de secret, « la clef du succès, c'est le portefeuille de produits ».
Un répertoire à ouvrir
Le Conseil d'Etat a jugé en mai 2000 qu'il revenait à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) de « vérifier que le laboratoire fabriquant un médicament générique dispose d'une licence d'exploitation de la spécialité princeps ou que les droits de propriété intellectuelle attachés à cette spécialité sont expirés préalablement à l'inscription du médicament générique au répertoire ». Ce système freine l'extension du répertoire du générique qui « atteste le caractère substituable des médicaments figurant dans un même groupe générique ». Pour permettre l'élargissement du répertoire, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2004 propose que l'inscription au répertoire se fasse au moment de l'AMM (et non au moment de la commercialisation du médicament, ce qui est le cas actuellement). Les industriels peuvent alors s'accorder entre eux sur la propriété intellectuelle du produit au moment de sa commercialisation.
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