Le gouvernement de l'une des régions espagnoles, les Asturies, a-t-il le droit d'interdire aux médecins, embauchés depuis le 1er janvier 2003 dans les hôpitaux publics locaux, de travailler en même temps dans une clinique privée ?
Même si cette interdiction ne remet pas en cause le supplément salarial versé aux professionnels qui acceptent de se consacrer entièrement à leur travail dans le système public, le Conseil de l'Ordre des médecins de la région et plusieurs organisations syndicales de médecins le contestent. Et le gouvernement central, malgré les raisons avancées par l'administration régionale pour justifier sa décision (améliorer le service public de santé et étendre l'activité des médecins à l'après-midi pour réduire les listes d'attente pour une consultation ou une intervention chirurgicale), a décidé, le 28 mars, de déposer un recours contre cette prétention régionale devant le Tribunal constitutionnel.
En Espagne, les médecins qui travaillent dans le système de santé public peuvent exercer en même temps, l'après-midi, dans une clinique privée, s'ils n'ont pas signé la clause d'exclusivité instaurée depuis la fin des années 1980 par le gouvernement socialiste de l'époque. Or, pour les médecins embauchés entre la mise en pratique de cette clause, en 1987, et 1996, année de l'arrivée au pouvoir du gouvernement du Parti populaire à Madrid, l'exclusivité était déjà obligatoire. Le Dr Marciano Sanchez Bayle, pédiatre à l'hôpital Niño Jesus de Madrid et porte-parole de la Fédération des associations de défense de la santé publique (FADSP), estime que « le gouvernement des Asturies ne fait que revenir à la situation antérieure à 1996 ». Pour Marciano Sanchez Bayle, « le principal problème de l'exclusivité est qu'elle n'a jamais été contrôlée », ce qui a permis à des médecins percevant la prime qui lui est liée d'occuper l'après-midi un poste dans une clinique privée, où les soins sont facturés.
La définition du travail des cliniques privées donne lieu régulièrement à des polémiques en Espagne. Certaines régions ont tenté de clarifier la situation. C'est ainsi que l'Estrémadure a annoncé récemment que des cliniques privées pourraient être engagées par le système public pour réduire les listes d'attente, seulement si leur équipe médicale n'avait aucun emploi dans les hôpitaux publics.
Mais le Dr Carmen Rodriguez Menendez, présidente du conseil de l'Ordre régional et responsable des analyses cliniques de l'Institut national de la Ssilicose de l'Hôpital central des Asturies, conteste les raisons d'une telle décision. « Nous défendons la liberté de l'acte médical pour les professionnels ; nous défendons également la pluralité du système car, si l'exclusivité redevenait obligatoire, notre secteur privé de la santé, qui occupe actuellement dans les Asturies 24 % des médecins travaillant dans le système public de la Sécurité sociale, disparaîtrait sûrement à moyen terme dans notre région. »
Carmen Rodriguez affirme qu'elle veut en plus « protéger la demande de la société : il y a des gens qui souhaitent payer leur consultation chez le médecin parce qu'ils apprécient, par exemple, l'intimité d'un cabinet médical privé, comme ils peuvent vouloir se payer un bon repas dans un bon restaurant ». Quant à la comptabilité des horaires du professionnel dans les secteurs public et privé, selon Carmen Rodriguez, « le choix du médecin doit être volontaire ».
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