Râles
Marie, 7 ans, tousse depuis au moins une quinzaine de jours, elle est souvent fébrile mais la température n'est pas évaluée. Elle est fatiguée, mange peu. Elle a reçu différents sirops sans effet franc. Elle est eupnéIque et rose. L'auscultation retrouve des sibilants fins et des râles surtout à droite. Sa soeur, Aurore, 4 ans, tousse également depuis 8 jours. Sa température était à 39 °C il y a 4 jours. Elle est traitée par amoxicilline mais continue à être malade.
Marie a un bilan : la numération est quasi normale, la CRP à 61 mg/l, la radiographie pulmonaire retrouve un foyer du lobe inférieur droit à limite floue. La radiographie d'Aurore montre un foyer du lobe moyen. Elles sont traitées par macrolide pendant 15 jours. La sérologie prélevée chez Marie reviendra positive à Mycoplasme pneumoniae en IgM. Les radiographies de contrôle 1 mois après sont normales. Aurore va bien, Marie tousse encore souvent avec toujours quelques sibilants à l'auscultation.
Bilan d'une toux
L'épidémiologie des pneumonies est différente selon l'âge. Avant 3 ans, les virus et le pneumocoque prédominent ; après 3 ans, le pneumocoque et le mycoplasme sont les germes les plus fréquents.
Selon les études, la répartition des étiologies est la suivante :
– streptocoque pneumoniae dans 15 à 30 % des cas, la vaccination ne modifie pas la conduite à tenir dans ces infections pulmonaires pour le moment ;
– haemophilus non typable dans 3 à 10 % des cas chez le petit enfant, l' haemophilus sérotype b ayant lui pratiquement disparu depuis la vaccination contre cette bactérie ;
– mycoplasme pneumoniae dans 6 à 40 % des pneumonies après l'âge de 5 ans ; dans les études récentes, il est mis en cause assez souvent dès l'âge de 2 ans ;
– Chlamydiae pneumoniae dans 2 à 9 % des cas dès l'âge de 5 ans et surtout après 10 ans ;
– Brahamella catarrhalis dans 3 % des cas.
Radiographie
Devant toutes ces toux, quand demander une radiographie de poumon, seul moyen de poser le diagnostic ?
– Association toux + fièvre (variable selon l'étiologie) + tachypnée + anomalies auscultatoires focalisées ;
– toux persistante allant crescendo plus ou moins fébrile, auscultation peu contributive (pleurs) ;
– recherche d'une complication lors d'une pathologie telle qu'une bronchiolite très fébrile, une crise d'asthme fébrile...
Le pneumocoque est responsable de fièvre élevée, à début brutal ; de toux sèche ; de signes auscultatoires en foyer, de douleurs abdominales. Le mycoplasme induit, à l'inverse, des tableaux plus progressifs, moins fébriles, avec asthénie et signes d'hyperréactivité bronchique fréquents (wheezing, sibilant...) comme dans l'histoire de Marie et d'Aurore. Seule une radiographie de face stricte en inspiration, en position debout, peut être interprétable.
L'image typique est une opacité parenchymateuse, segmentaire ou lobaire, parfois ronde (particulière à l'enfant), le plus souvent liée au pneumocoque mais parfois due aussi au mycoplasme.
L'aspect d'infiltrat diffus est plus compatible avec une pneumonie virale ou à mycoplasme.
Le foyer rétrocardiaque ou situé dans l'angle costophrénique peut être piégeant ; en cas de doute, un cliché de profil peut être utile.
Un cliché en expiration et en inspiration doit être demandé au moindre doute devant un syndrome de pénétration (corps étranger inhalé).Cette radiographie doit toujours être recontrôlée 4 à 5 semaines plus tard ; pas avant car la disparition radiologique des images anormales est décalée par rapport à la clinique.
Biologie
Quelques examens peuvent être parfois utiles notamment pour orienter plus précisément le diagnostic bactériologique, comme dans notre cas clinique : numération-formule sanguine ; CRP ; sérologie mycoplasme pneumoniae avec IgM et IgG ; hémoculture rarement effectuée en ville.
L'hospitalisation est nécessaire d'emblée si : nourrisson de moins de 6 mois ; signes cliniques de gravité : polypnée, cyanose... ; maladies sous-jacentes ; épanchement pleural et/ou adénopathies intertrachéo-bronchiques à la radiographie ; pneumopathies récidivantes.
Traitement
Antibiotique toujours, monothérapie toujours.
L'antibiothérapie dans les pneumonies de l'enfant doit être systématique et urgente. Aucun signe clinique ou radiologique n'est prédictif de l'agent infectieux responsable. De par sa gravité, la cible privilégiée reste le pneumocoque.
Avant 3 ans, le traitement est amoxicilline 100 mg/kg/j en 3 prises pendant 10 jours. Après 3 ans, l'attitude reste la même, plutôt 80 mg/kg/jour. On peut cependant prescrire un macrolide pendant 14 jours en première intention en cas de signe clinique et radiologique évocateurs.
La fièvre est le critère de surveillance le plus fiable.
L'apyrexie est souvent obtenue en moins de 24 heures en cas de pneumonie à pneumocoque. Dans les autres cas, elle peut durer de 2 à 4 jours. La toux est résolutive en une semaine en moyenne parfois plus avec un certain degré d'hyperréactivité bronchique dans les infections à germe atypique. Au-delà de 48/ 72 heures, la persistance de la fièvre conduit à l'hospitalisation en cas d'aggravation ou à un passage aux macrolides en cas de situation stable. En cas d'allergie à la pénicilline, on recommande les céphalosporines injectables de 3e génération et, après 6 ans, en l'absence de trouble digestif, la pristinamycine.
Les céphalosporines orales de 2e et de 3e génération ne sont pas recommandées en première intention, les concentrations atteintes dans le parenchyme pulmonaire n'y étant pas optimales.
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