Vieillissement de la population, multiplication des voyages, exposition à de nouveaux risques infectieux, résurgence chez l'adulte de certaines maladies jusqu'alors infantiles, fin de la conscription : autant d'évolutions qui ont considérablement modifié les pratiques et les enjeux de la vaccination chez l'adulte. A tel point que certaines autorités médicales le désignent aujourd'hui comme le grand « oublié de la vaccination ».
C'est, entre autres, le point de vue du Pr René Roué, président de la Ligue française pour la prévention des maladies infectieuses : « Le temps de l'obligation vaccinale, hormis pour certaines professions, est révolu pour les adultes. Notre pays tire aujourd'hui les bénéfices de campagnes menées régulièrement dans les quarante dernières années. Mais il reste des poches de résistance, inacceptables, inexcusables. La moindre perception du risque des maladies peut naturellement induire une baisse de la vigilance, alors que ce risque n'a pas disparu. » Pour maintenir le cap d'une couverture vaccinale optimale, le Pr Roué en appelle à « la responsabilité de chacun : celle de tous les médecins, mais également des politiques, des juges, des enseignants, des parents... » Et de rappeler que, selon le Baromètre santé 2000 (1), plus de 9 Français sur 10 âgés de 15 à 75 ans se déclarent favorables à la vaccination - malgré « l'impact négatif des décisions politiques et juridiques (en la matière) et de leur amplification médiatique répétée ». Pour le président de la Ligue française pour la prévention des maladies infectieuses, « le temps des responsabilités » est venu en ce qui concerne la vaccination des adultes.
Le rôle du généraliste
Dont acte. Le Tour de France de la vaccination de l'adulte a permis une mobilisation à l'heure où les enjeux de la vaccinologie changent. En effet, d'un concept initial de vaccination collective et obligatoire, nous sommes passés (exception faite des professionnels de santé) à un concept de vaccination personnalisée, fondée sur l'information et la responsabilisation de chacun. Dans ce contexte, l'information faite aux professionnels de santé (en particulier, les généralistes, les médecins du travail, des collectivités, etc.) est capitale. C'est de leur implication que dépend la couverture vaccinale : ce sont eux qui permettent à chacun d'être vacciné et qui participent ainsi aux enjeux de santé publique. C'est pourquoi le Tour de France de la vaccination leur était destiné.
Mené en partenariat avec Aventis Pasteur MSD, et sous le parrainage de l'Association des professeurs de pathologie infectieuse et tropicale (APPIT) et de la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF), ce Tour de France a réuni plus de 1 500 professionnels de santé au cours de soirées d'information. Chaque réunion était présidée par un membre de l'APPIT, qui se chargeait localement du choix des intervenants et des thèmes abordés - pour la plupart, des problématiques rencontrées en pratique. Sur 69 interventions au total, 17 ont été consacrées à la vaccination des seniors, 15 à la vaccination du voyageur, 13 à la vaccination de l'adulte et du jeune, tandis que 12 portaient sur des cas particuliers, tels que la vaccination de la femme enceinte ou le rôle de la médecine du travail. Ces rencontres ont permis de dresser un rapide état des lieux : la vaccination des adultes est insuffisante, plus particulièrement celle des femmes et des personnes âgées, au regard de maladies graves (tétanos, grippe, pneumonies à pneumocoques, etc.) par elles-mêmes ou pour leur enfant (rubéole) ; difficulté de suivi vaccinal en l'absence de documents standardisés mis à jour ; impact négatif de décisions trop médiatisées).
Les échanges « riches » et « de grande qualité » entre intervenants et assistance ont permis à cette initiative de « crever les abcès du non-dit et du silence autour de la vaccination, jusqu'alors très pesants », selon le Pr Roué. Une politique de santé plus volontaire en matière de vaccination de l'adulte ne peut passer que par l'information et l'éducation, tant à l'attention des vaccinateurs que du grand public. Une information objective sur les bénéfices-risques des vaccins doit être diffusée. Les médecins souligneront aux patients l'intérêt, les effets secondaires, le mode d'action et l'efficacité des vaccinations. Ils doivent disposer d'outils précis pour être au fait des données épidémiologiques justifiant les orientations détaillées dans le calendrier vaccinal. Le public, lui aussi, doit être informé des vaccins actuellement recommandés dans le calendrier et des objectifs de cette vaccination.
Le Pr Patrick Choutet, président de l'APPIT, propose de « promouvoir des campagnes de vaccination de l'adulte », à l'instar des campagnes à destination des enfants. « Elles pourraient concerner les personnes à risque et/ou l'ensemble de la population. Elles dépendent des autorités ministérielles, de l'assurance-maladie, et les médecins et professionnels de santé, dont beaucoup ont participé à notre Tour de France,peuvent en être les relais. »
* Baromètre santé 2000 CFES, réalisé avec le soutien du ministère de l'Emploi et de la Solidarité (DGS, Drees, division SIDA), de la CNAMTS, de l'OFDT, de la MILDT, du HCSP et de la FNMF.
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