Les résultats publiés dans le « BEH » (n° 45) portent sur un échantillon de 3 076 diabétiques de type 2, de moins de 80 ans, qui ont bénéficié du régime général des travailleurs salariés pour le remboursement d’antidiabétiques oraux et/ou d’insuline au cours du dernier trimestre 2001. L’âge moyen est de 64 ans et la plupart sont nés en France : 80 % contre 11 % au Maghreb, 4 % en Europe du Sud et 5 % dans le reste de l’Europe ou en Asie. La moitié d’entre eux a un diabète connu depuis au moins dix ans, pour lequel 17 % bénéficient d’un traitement par insuline.
Profil de risque vasculaire.
Les diabétiques de type 2 qui vivent en France ont un statut socio-économique moins favorable que celui de la population générale : niveau d’études plus faible, appartenance plus fréquente à la catégorie des ouvriers ou à celles des sans emplois et des retraités.
La fréquence plus élevée de l’obésité, principal facteur de risque du diabète de type 2, dans cette population expliquerait en partie ce lien. La différence observée entre le profil de risque vasculaire des moins favorisés et celui des gens dont le statut est plus favorable témoigne plutôt d’une différence de prise en charge médicale. Plus souvent obèses, les moins favorisés déclarent moins fréquemment une hypertension artérielle ou une dyslipidémie. C’est probablement le reflet, affirment les auteurs de l’étude, d’un «défaut de diagnostic des médecins et/ou une sous-déclaration par les personnes elles-mêmes». Ces personnes rapportent plus souvent une complication macrovasculaire et présentent un moins bon contrôle glycémique (HbA1C plus élevée).
Non seulement elles ont plus souvent recours à un généraliste et moins souvent à un spécialiste, mais la qualité des soins (fond d’oeil et examen au microfilament) est moins bonne. Ce pourrait être lié «à l’existence d’une barrière culturelle, notent les auteurs. Les personnes moins favorisées auraient une moindre connaissance des filières de soins, un rapport différent au corps ou à la maladie et une qualité de communication différente avec leur médecin».
Les limites de cette étude exploratoire sont soulignées par les auteurs : ceux qui ont répondu à l’enquête étaient globalement mieux pris en charge que ceux qui n’y ont pas répondu, ce qui conduit à une surestimation de la qualité du suivi des patients. Certaines données, par ailleurs, n’ont pas été recueillies, tels le montant des revenus ou l’origine ethnique ou culturelle, qui n’est qu’imparfaitement approchée par le pays de naissance. Le risque vasculaire des personnes diabétiques nées au Maghreb (obésité ou dyslipidémie) est, par exemple, moins élevé que celui des personnes nées en France, bien que les niveaux de LDL et d’HbA1C mesurés par les médecins soient plus élevés. Ils ont plus fréquemment une atteinte ophtalmique (rétinopathie et traitement par laser), alors que le fonds d’oeil, nécessaire au diagnostic et au traitement, est moins souvent réalisé. Là aussi les auteurs émettent des hypothèses : sous-déclaration de certains facteurs de risque par les personnes, défaut de diagnostic et de prise en charge par leur médecin ou même forme particulière de diabète.
Dépistage communautaire.
Prévalence du diabète de type 2 plus importante, profil de risque vasculaire différent, complications cardio-vasculaires plus fréquentes et prise en charge de moindre qualité, couplée à un taux de mortalité liée à la maladie nettement supérieur, comme l’avait montré une étude de 1999, toutes ces observations montrent que des «efforts doivent être faits pour améliorer la prévention, l’éducation thérapeutique et la prise en charge du diabète des personnes issues des milieux moins favorisés», concluent les auteurs. Les recommandations pour la prise en charge du diabète de type 2 (voir principes du dépistage de l’Anaes, février 2003) vont déjà dans ce sens quand elles proposent d’associer au dépistage opportuniste et ciblé (sujets de plus de 45 ans qui présentent au moins un facteur de risque de diabète de type 2, en plus de l’âge : origine non caucasienne et/ou migrant ; marqueur du syndrome métabolique (excès pondéral, hypertension artérielle, dyslipidémie); chez les femmes : antécédents de diabète familial du premier degré, antécédent de diabète gestationnel et/ou de naissance d’enfant de plus de 4 kg, antécédent de diabète temporairement induit), un dépistage communautaire des sujets de plus de 45 ans appartenant à des populations précaires. L’InVS insiste de plus sur les complications microvasculaires, qui sont insuffisamment dépistées alors qu’elles peuvent conduire, à leur stade ultime, à la dialyse, la cécité et l’amputation. «Cette situation est aggravée chez les personnes diabétiques âgées qui devraient bénéficier d’un suivi aussi attentif que les personnes jeunes», souligne l’Institut.
L’hyperglycémie fait 3 millions de morts par an
OUTRE le million de décès dus au diabète, l’hyperglycémie est responsable de 2,2 millions de morts chaque année dans le monde, selon une étude américaine publiée dans « The Lancet » du 11 novembre (Goodarz Danaei et Majid Ezzati, Harvard School of Public Health). Les chercheurs ont rassemblé des données de 52 pays. Selon leurs résultats, 21 % des décès par infarctus du myocarde et 13 % de ceux par AVC sont attribuables à une glycémie supérieure au taux optimal standardisé en fonction de l’âge.
La plupart de ces décès cardio-vasculaires (1,84 million) surviennent dans des pays à faibles ou moyens revenus. Pour l’infarctus, l’Asie du Sud, avec 548 000 décès, est la région la plus concernée, suivie par l’Europe et l’Asie centrale (313 000). Elle est aussi en tête pour les AVC (215 000 décès).
Au total, l’hyperglycémie est donc responsable de 3,16 millions de morts, chiffre à comparer aux décès dus au tabac (4,8 millions), au cholestérol (3,9 millions) et à l’obésité (2,4 millions). «Le risque cardio-vasculaire et la prise en charge du diabète devraient être intégrés dans les mêmes programmes», estiment les auteurs.
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