Le mouvement de grève des médecins libéraux entamé ces deux derniers jours à l’appel de l’ensemble des syndicats, et qui est amené à se poursuivre jusqu’au 31 décembre, est un « succès », selon la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF). « Plus de 70% des médecins généralistes et spécialistes libéraux ont fermé leur cabinet ce mercredi 24 décembre », a annoncé ce même jour le Dr Jean-Paul Ortiz, président du syndicat.
Relevé rigoureux
La Confédération a organisé un « relevé rigoureux » de l’état du mouvement par ses responsables départementaux. Elle observe que le taux de cabinets fermés dépasse les 80 % dans plusieurs régions : l’Alsace, la Bretagne, le Centre, la Basse-Normandie, les Pays-de-Loire, Lorraine, Picardie, Poitou-Charentes, Rhônes-Alpes, les DOM et la couronne parisienne. De même, dans certaines cliniques, des services sont en cessation d’activité.
Ce mouvement de contestation contre le projet de loi de santé du gouvernement devrait même s’amplifier entre Noël et jour de l’an, pronostique le Dr Ortiz. Ces premiers relevés confirment la tendance d’une mobilisation massive annoncée hier par MG France.
« La grève n’est pas dans l’ADN des médecins, explique Jean-Paul Ortiz. S’ils s’y sont résolus, cela démontre l’état d’exaspération de la profession. »
De nombreux griefs
« Le niveau de mobilisation est sans précédent, l’ensemble du corps médical manifeste de façon massive et unitaire son opposition aux mesures délétères du projet de loi de santé », poursuit le Dr Ortiz, selon qui le gouvernement est « mis au pied du mur ». « La médecine libérale ira jusqu’au bout pour obtenir le retrait de mesures inacceptables de ce projet de loi et la satisfaction de revendications tarifaires légitimes », a ajouté le patron de la Confédération.
La généralisation du tiers payant obligatoire, le nouveau service territorial de santé au public qui donnerait selon le syndicat les pleins pouvoirs aux ARS, l’interdiction des dépassements dans le cadre des missions du futur service public hospitalier ou le démantèlement du métier par la délégation de tâches sont les principaux griefs du syndicat contre la réforme de Marisol Touraine.
La CSMF réclame également des revalorisations d’honoraires et le passage de la consultation à 25 euros, l’acte médical étant en France l’un des moins bien rémunérés d’Europe.
Nombreuses réquisitions
Les médecins libéraux n’ayant aucune obligation de se déclarer gréviste (hormis s’ils sont inscrits à un tableau de garde), les nombreuses réquisitions effectuées dans de nombreuses régions par les préfets auprès des médecins de ville et des établissements sont des indices que la grève est massivement suivie. « On ne pensait pas à la mi-octobre, en lançant notre mouvement, obtenir une telle mobilisation sur le terrain, témoigne le Dr Luc Duquesnel, président de l’UNOF, la branche généraliste de la CSMF. Pour la première fois, on réquisitionne des médecins régulateurs. »
La colère touche l’ensemble du corps médical. « Trente-cinq syndicats de verticalité ont appelé à la grève, analyse le Dr Patrick Gasser, président de l’UMESPE, la branche spécialiste de la CSMF. Cela aura un impact sur le nombre de patients qui seront envoyés aux urgences. Déjà une grande partie des anesthésistes sont en cessation d’activité ainsi que des pédiatres ou des gynécologues-obstétriciens… »
Le syndicat assure que les médecins ne se déroberont pas à leurs responsabilités et répondront favorablement aux réquisitions organisées par les préfets. De même les praticiens informeront leurs patients de la marche à suivre en indiquant, « de vive voix ou sur répondeur », les coordonnées du service habituel d‘appel pour le médecin de garde (le 15 ou le numéro spécifique au département).
Revoyure à la rentrée
Selon la CSMF, les ARS ont mis beaucoup de temps à mesurer l’ampleur de la grève. « Nous n’avons pas pris le gouvernement en traitre, nous avons lancé ce mouvement le 5 novembre, explique le Dr Ortiz. Si un problème survient pendant la période du 24 au 31 décembre, cela sera de la responsabilité exclusive des services de l’Etat. »
Après l’accord trouvé rapidement par les urgentistes hospitaliers avec le ministère de la Santé, le Dr Ortiz espère que les médecins libéraux obtiendront également satisfaction. Marisol Touraine a annoncé une nouvelle étape de concertation des médecins libéraux à la rentrée, début janvier, mais a pour l’heure exclu toute revalorisation tarifaire.
Ce mercredi après-midi, ce ne sont pas des médecins libéraux mais des praticiens hospitaliers qu’elle rencontrera. Elle rend visite en compagnie du Premier ministre Manuel Valls, à des enfants malades à l’hôpital parisien de Trousseau.
Contacté par « le Quotidien », le ministère de la Santé n'a pas souhaité commenter le taux de mobilisation annoncé par la CSMF , jugeant difficile d'attribuer l'ensemble des fermetures de cabinets à la grève. Le ministère de la Santé assure que pour l'heure, la continuité des soins est garantie, "aucune difficulté particulière" n'ayant été relevée.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature