La discussion en séance publique du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2003, qui devrait se terminer aujourd'hui, a permis, au-delà des joutes oratoires habituelles, d'ouvrir le débat sur l'avenir du système solidaire à la française, que l'opposition juge désormais « en danger ».
Si Jean-François Mattei affirme précisément vouloir « sauver ce système de Sécurité sociale solidaire et juste hérité de 1946 », en posant aujourd'hui les jalons d'une réforme jugée indispensable, les députés socialistes ont, à de nombreuses reprises, mis en doute cette volonté, accusant ouvertement le gouvernement de préparer « insidieusement » un changement de système tout en laissant « filer » les dépenses. « Déremboursements des prestations (...) absence de mesures structurelles pour maîtriser l'évolution des dépenses, la boucle est bouclée pour que le gouvernement aille progressivement vers un autre système de couverture maladie tout en affirmant le contraire », a résumé Claude Evin (PS), principal orateur de l'opposition. Sur LCI, Jean-Pierre Raffarin avait, de son côté, observé qu'il faudrait demain faire davantage appel aux mutuelles et assurances complémentaires.
Comment médicaliser l'ONDAM ?
Dans ce débat sur l'avenir de la Sécu, la majorité a surtout marqué sa volonté de mieux appréhender, et donc contrôler, les finances sociales, alors même que ce PLFSS écarte l'hypothèse d'un retour à l'équilibre du régime général l'année prochaine (3,9 milliards d'euros de déficit attendu en 2003 contre 3,3 milliards cette année). A la faveur d'amendements UMP, les députés ont obtenu, comme prévu, la création d'un office parlementaire d'évaluation des politiques de santé ou encore l'engagement du gouvernement de transmettre, dès l'année prochaine, au Parlement plusieurs rapports qui devront clarifier la situation comptable de la Sécurité sociale.
Jean-François Mattei s'est ainsi engagé à transmettre en 2003 au Parlement un état des lieux des « relations financières entre l'Etat et la Sécurité sociale ». Quant à la fixation de l'Objectif national de dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) sur des critères médicaux et non plus budgétaires, promise par le gouvernement, mais renvoyée à un groupe de travail qui remettra ses conclusions au premier trimestre 2003, elle fait également l'objet de critiques. « Ne brandissez pas des slogans, a mis en garde Claude Evin (PS). Personne n'a encore expliqué comment cette médicalisation (de l'ONDAM) peut se faire. » Pour Jean-Luc Préel, seule la mobilisation des observatoires régionaux de santé et de « conseils régionaux de santé » permettront de médicaliser enfin les objectifs de dépenses et de les rendre plus « crédibles ».
Omniprésent lors du débat sur les ressources, Maxime Gremetz (PC) a, sans succès, multiplié les amendements pour « financer autrement » la Sécurité sociale, notamment par une taxation des revenus financiers ou un alourdissement de la fiscalité de certaines entreprises qui « délocalisent et multiplient les licenciements boursiers ».
Fait plutôt rare : contre l'avis du gouvernement, et après de longs échanges, les députés de la majorité ont encore alourdi la fiscalité du tabac, en portant à 20 % l'augmentation des minima de perception sur les cigarettes. Jean-François Mattei, qui craint des « fraudes » et des « trafics » en cas d'augmentation trop brutale, proposait une majoration des taxes perçues par l'Etat de 17,7 %, seuil qualifié de « maximum raisonnable ». Mais Yves Bur (UMP, Bas-Rhin) a tenu bon : « Il faut porter un coup d'arrêt aux lobbies du tabac », a-t-il estimé, invoquant un « souci majeur de santé publique ». Cette mesure conduira à une hausse des prix de vente de plus de 15 %. Les députés ont également voté un amendement qui permettra d'inscrire sur les paquets de cigarettes le slogan explicite « Le tabac tue », assorti d'avertissements médicaux tels que « fumer bouche les artères » ou « fumer peut réduire la fertilité ».
Par ailleurs, en ce qui concerne la taxe sur la promotion appliquée aux laboratoires (portant notamment sur les achats d'espace publicitaire), l'Assemblée a adopté un sous-amendement du gouvernement qui instaure un régime spécifique favorable aux journaux médicaux détenteurs d'un numéro de commission paritaire. Plusieurs députés de la majorité et de l'opposition ont souligné le rôle important de la presse médicale dans la FMC des médecins.
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