Sur les 12 milliards du plan d’économies présenté mercredi par le Premier ministre, 1,1 milliard proviendra de l’augmentation du prix du tabac, de la hausse de la fiscalité et des prélèvements sociaux sur les alcools forts et de la création d’une taxe sur les boissons sucrées. Ces mesures figureront dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012. Pour François Fillon, il s’agit « d’infléchir la progression des dépenses d’assurance-maladie par le renforcement de nos outils de santé publique ». Ces mesures doivent permettre de « freiner la consommation de produits – tabac, alcool, sodas – dont une consommation excessive est fortement facteur de risques pour la santé ». La secrétaire d’État à la Santé, Nora Berra, renchérit : « Ces mesures sont plus que des mesures financières, ce sont des mesures sanitaires qui vont directement soutenir les actions de prévention et de lutte que nous menons dans le cadre de nos politiques de santé publique. »
Mais, au-delà du marketing politique, l’impact concret en matière de santé publique risque d’être plus que nuancé. Ainsi, pour le tabac le gouvernement prévoit d’augmenter les prix de 6 % dès le mois d’octobre, puis de 6 % en 2012. Au total, 690 millions de recettes supplémentaires sont attendues dans les comptes de la Sécurité sociale. Pour le Comité national contre le tabagisme (CNCT), « cette hausse (…) s’inscrit dans la seule perspective budgétaire visant à réduire l’endettement de notre pays » et ne renforce en rien la lutte contre le tabagisme. « Les précédentes hausses de prix (de 2009 et 2010), qui étaient également limitées à 6 %, ont avant tout favorisé les marges des fabricants de tabac, les revenus des buralistes et dans une certaine mesure les caisses de l’État mais sans avoir un quelconque impact sur la consommation de tabac », qui augmente, au contraire, depuis 2005. À l’instar des autres associations de lutte contre le tabagisme, le CNCT plaide pour une hausse de 10 % en une seule fois et non diluée dans le temps.
Engrenage enclenché.
S’agissant des alcools forts, le gouvernement veut augmenter la fiscalité sur les boissons de 40° et plus, « de l’ordre de 90 centimes par litre ». Si le dispositif doit générer environ 340 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la Sécu, là aussi, les progrès en termes de santé publique risquent d’être difficilement perceptibles. En effet, les rhums et les productions régionales (Cognac, Calvados…) ne sont pas concernés par la mesure.
Enfin, en créant une taxe sur certaines boissons sucrées, le gouvernement entend soumettre ces produits à un taux normal de TVA (19,6 % contre 5,5 % actuellement) ; 120 millions de recettes supplémentaires sont espérées. Sont toutefois exclus les eaux aromatisées, les jus de fruit sans sucres ajoutés, mais aussi les produits contenant des édulcorants. Renchérir de la sorte le prix des boissons sucrées ne devrait par ailleurs ni contribuer à « freiner le développement de l’obésité », ni vraiment inciter les Français à réduire leur consommation, comme l’affirme le gouvernement. L’Association nationale des industries alimentaires (Ania) estime que le prix de la canette de soda ne devrait augmenter en moyenne que d’un centime d’euro.
Pour la Ligue contre le cancer, ces annonces de François Fillon relèvent du « non-événement sanitaire ». Néanmoins, ajoute la Ligue, « sans s’en rendre compte, le Premier ministre ouvre des champs de discussion que nous appelions de nos vœux sur les questions de l’alcool et de la taxation des sodas. L’engrenage est enclenché et nous allons nous saisir de ce marketing politique pour aller beaucoup plus loin sur ces dossiers ».
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