AUX ETATS-UNIS, les troubles liés à un abus d’alcool sont un problème majeur de santé publique. Dix-huit millions d’Américains sont des buveurs excessifs, 2,4 millions sont diagnostiqués comme tels et 8 % sont alcoolodépendants. Malheureusement, 15 % seulement d’entre eux demandent à entrer dans un système de soins et environ 1 adolescent de plus de 17 ans sur 4 est exposé au risque de consommation excessive d’alcool, compte tenu de l’environnement familial de buveurs excessifs.
Le traitement de l’alcoolisme aux Etats-Unis a longtemps été dominé par des traitements non médicamenteux. Au début des années 1970, des données issues d’expérimentions animales ont démontré que l’alcool active le système opioïde endogène et, dans les années 1980, un faisceau d’arguments cliniques a confirmé que le blocage des récepteurs aux opiacés diminue les effets de l’alcool sur le système de récompense et améliore les taux d’abstinence chez les patients qui se soumettent à une prise en charge psychosociale.
Le traitement de la dépendance à l’alcool après la première phase de sevrage a pour objectif d’obtenir une abstinence à long terme.
Trois médicaments approuvés par la FDA.
Néanmoins, seulement 20 % des patients qui sont reconnus alcoolodépendants sont traités et 1 % reçoivent un traitement ciblé sur la dépendance à l’alcool.
Trois traitements pharmacologiques sont actuellement approuvés par la FDA dans le traitement de la dépendance à l’alcool :
– un médicament à visée dissuasive, le disulfiram, qui provoque un effet antabuse. L’inhibition de l’acétaldéhyde déshydrogénase entraîne une élévation de la concentration en acétaldéhyde, métabolite de l’alcool éthylique, responsable de réactions désagréables telles des bouffées congestives du visage ou des nausées ;
– deux médicaments ciblés sur les mécanismes neurochimiques de la dépendance à l’alcool, l’acamprosate, agoniste du système gabaergique et antagoniste du glutamate, et la naltrexone, antagoniste des opiacés.
Les résultats d’une métaanalyse de 9 essais cliniques réalisée par Kranzler et Van Kirk démontrent que la naltrexone a un effet globalement positif. Comparativement au placebo, la naltrexone diminue le nombre de jours de consommation importante et le besoin d’alcool, le bénéfice étant plus important en cas de thérapie cognitive associée.
La naltrexone administrée à la posologie de 50 mg/j est bien tolérée, les principaux effets indésirables sont des troubles digestif (nausées, constipation) et des céphalées.
De nombreux essais cliniques ont montré que, comparativement au placebo, l’acomprosate permet d’obtenir un taux élevé d’abstinence complète, un laps de temps plus long avant une première consommation d’alcool et/ou une augmentation du pourcentage de jours d’abstinence. Le taux d’observance au traitement est supérieur à 85 %, équivalent à celui du placebo.
L’étude COMBINE (Combining Medications and Behavioral Interventions for Alcoholism) est un essai contrôlé, multicentrique, randomisé, mené de janvier 2001 à janvier 2004 chez 1 383 volontaires (âge moyen 44 ans) alcoolodépendants récemment abstinents pour comparer, dans le traitement de l’alcoolodépendance, l’efficacité des traitement médicamenteux, des thérapies comportementales et de leur association à celle d’un placebo. Huit groupes de patients ont été constitués pour recevoir 16 semaines de traitement par naltrexone (100 mg/j) ou acamprosate (3 g/j) ou l’association des deux avec ou sans placebo, avec ou sans prise en charge psychothérapique et intervention comportementale. Les patients ont été évalués un an après l’arrêt du traitement.
Une diminution importante de la consommation d’alcool a été constatée dans tous les groupes. Le pourcentage de jours d’abstinence a triplé (de 25 à 73 %), la consommation d’alcool a baissé de 80 % (de 66 à 13 verres).
Les meilleurs résultats sur la consommation d’alcool ont été observés dans les groupes naltrexone ou prise en charge comportementale combinée et le groupe naltrexone et prise comportementale combinée, alors que l’acamprosate associé ou non à une prise en charge comportementale combinée ou en complément de la naltrexone ne s’est pas révélé plus efficace que le placebo.
Les cliniciens ont maintenant à leur disposition des traitements qui peuvent aider les patients alcooliques à réduire leur consommation d’alcool. Toutefois, ils devront évaluer la place de la pharmacothérapie dans le traitement global du patient en portant un diagnostic multidimensionnel incluant la santé physique, les comorbidités psychiatriques, la motivation, le contexte et les ressources à disposition.
Les travaux de recherche se poursuivent pour mettre au point d’autres agents addictolytiques.
D’après la communication du Pr Hugh Myrick (Etats-Unis).
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