LES DERNIERS ESPOIRS d'amélioration du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) se sont évanouis après l'accord intervenu sur ce texte en commission mixte paritaire (CMP). Et la version finale de ce budget 2008 de la « Sécu » laisse un goût amer aux représentants des médecins libéraux.
Le malaise est d'autant plus fort que plusieurs mesures «vexatoires» pour la profession, votées d'abord par les députés puis écartées par les sénateurs, ont été rétablies lors de la dernière ligne droite par la CMP.
Climat de suspicion.
C'est le cas notamment de la «contribution forfaitaire» sur les feuilles de soins papier, une taxation suggérée à l'origine par le député UMP Yves Bur afin d'accélérer la généralisation de la télétransmission (l'élu alsacien avait même proposé une amende de 0,50 euro par feuille papier, mais c'est finalement la convention qui fixera les modalités et le montant). Une «pénalisation imbécile», fulmine la Confédération.
La volonté des parlementaires d'accroître la transparence sur les tarifs se traduit in fine par un durcissement (relatif) de la législation. La dernière version du PLFSS instaure pour les professionnels une obligation de devis écrit précisant au patient le tarif des actes, la nature et le montant du dépassement facturé, dès lors que les honoraires dépassent «un seuil fixé par arrêté». Cette obligation de devis sera requise dans tous les cas (y compris au-dessous du seuil fixé) «si le professionnel prescrit un acte lors d'une consultation ultérieure». L'inobservation de cette obligation pourra faire l'objet d'une sanction financière égale au dépassement facturé. La CSMF redoute que cette exigence de devis crée un «climat de suspicion intolérable entre les praticiens concernés et leurs patients». L'obligation d'affichage «de façon visible et lisible» dans les salles d'attente (tarifs et dépassements) a également été conservée. En revanche, la CMP n'a pas souhaité rétablir l'encadrement du secteur à honoraires libres (voté par les députés, supprimé par les sénateurs), qui aurait imposé à tous les spécialistes de secteur II de facturer une «proportion minimale» (quota) d'actes en tarifs opposables. L'hypothèse avait notamment provoqué un émoi considérable dans les milieux chirurgicaux. Cet amendement «semble avoir effrayé la droite», ironisent les responsables santé du PS, Pascal Terrasse et Claude Pigement. Le PS profite de ce recul sur la limitation des dépassements pour dénoncer une situation qui conjugue «augmentation de déremboursement de toutes sortes et exclusion ou renoncement aux soins pour des raisons financières».
A propos du dossier médical personnel (DMP), dont on sait désormais qu'il faudra une dizaine d'années pour le généraliser, le droit au « masquage » de certaines données par le patient, objet de bien des controverses, a été réintroduit dans le projet de loi, mais de façon encadrée. L'article garantit les conditions dans lesquelles «certaines informations peuvent être rendues inaccessibles par le titulaire du DMP ou son représentant légal»; mais le texte affirme en même temps les modalités selon lesquelles «le professionnel de santé accédant au DMP a connaissance de l'inscription au dossier d'informations rendues inaccessibles par son titulaire ou son représentant légal». Pas convaincue, la CSMF affirme que le droit au masquage «signe l'arrêt de mort du DMP dont les médecins ne se serviront pas».
Le CNPS déjà en bataille.
Contrairement à l'an passé, la discussion parlementaire n'aura apporté aucun coup de pouce au taux de l'ONDAM (objectif national de dépenses d'assurance-maladie), fixé à 2,8 % pour 2008 ; et la répartition de cette enveloppe entre les secteurs de soins (soins de ville, hôpital…) n'a pas été modifiée, au grand dam des libéraux. Le Centre national des professions de santé (CNPS, qui réunit une trentaine de syndicats) a fait ses calculs : le budget octroyé à la ville «ne permettra pas une évolution normale de la rémunération des actes des professions de santé en exercice libéral, notamment pour les professions paramédicales».
Dans un communiqué au vitriol, le même CNPS, que dirige désormais le président de la CSMF Michel Chassang, étrille un PLFSS «qui organise la casse du système conventionnel» et soulève un «sentiment d'indignation» chez les libéraux de santé. Mais ce durcissement de ton n'est pas apprécié par tous les membres du CNPS. «Ce communiqué est parti sans avoir été validé, c'est indécent», fulminait un membre de l'institution dont l'opinion n'est pas aussi radicale.
Côté recettes enfin, la commission mixte paritaire a écarté l'imposition des boissons sucrées (taxe nutritionnelle de 1 %) qui avait été adoptée par le Sénat contre l'avis du gouvernement. Quant à la taxation des stock-options, elle a été validée dans la version (douce) du Sénat et ne s'appliquera qu'aux titres attribués après le 16 octobre 2007. Ce PLFSS prévoit de réduire le déficit du régime général à 8,8 milliards d'euros l'an prochain.
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