QUAND ELLE le rencontre au printemps 1894 alors qu’elle poursuit depuis trois ans des études à la Sorbonne, le savant, c’est lui. Timide et réservé, mais qui, après dix ans de travail et d’enseignement à l’école municipale de physique et chimie industrielle, a acquis une certaine réputation scientifique. Il a déjà à son actif de nombreuses publications et la découverte de la piézo-électricité (nos montres à quartz), en collaboration avec son frère. Il est en train d’achever sa thèse sur le magnétisme, où il a établi la loi de Curie.
Quand elle-même cherche un sujet de thèse en 1896, après avoir passé son agrégation, c’est encore lui qui va lui suggérer d’étudier les rayons uraniques, que Becquerel vient de mettre en évidence. C’est toujours lui qui a imaginé et construit le dispositif de mesure de la radioactivité qui va leur permettre de découvrir en 1898 le polonium et le radium. Une expérience reconstituée pour l’exposition du Panthéon avec des instruments d’origine**. L’exposition est située dans une salle de la crypte où sont inhumés les Curie, la tombe de Marie sur celle de Pierre, comme elle en avait émis le souhait pour sa sépulture dans le caveau de famille à Sceaux. On ne manquera pas d’aller leur rendre hommage. C’est sur le chemin.
L’atmosphère de l’exposition est tout aussi crépusculaire. C’est celle d’un laboratoire du début du XXe siècle, autant dire d’un hangar, glacial et mal éclairé. On s’y croirait. Les idées de Pierre Curie, elles, sont lumineuses. La piézo-électricité, la symétrie, le magnétisme et la radioactivité. Tout cela est très bien expliqué sur des panneaux qui semblent tout droit sortis d’une classe d’autrefois. Et illustrés par des photographies et des documents d’archives. Dans un coin, vision inattendue, un âne empaillé entre deux bottes de paille... L’image de l’âne de Buridan se laissant mourir de faim par incapacité de choix avait en effet servi à Pierre Curie pour illustrer la symétrie. Fils d’un médecin homéopathe, Pierre avait, il est vrai, reçu une éducation très particulière, proche de la nature mais sans aucune scolarisation, et ne souffrait donc d’aucun préjugé contre les ânes...
Au détour d’une vitrine, on s’aperçoit soudain que, le 19 avril 1906, la mort de Pierre Curie renversé par un fiacre partage la une avec le tremblement de terre de San Francisco.
Pierre, mort trop tôt. Avant la médiatisation dont sa femme fera l’objet.
Pierre qui avait dû intervenir auprès du comité Nobel pour que Marie soit associée en même temps que lui et Becquerel au prix Nobel de physique qui leur sera décerné le 10 décembre 1903. Pierre qui le premier, avec Becquerel, fut brûlé par les rayons et envisagea des applications médicales.
* Jusqu’au 31 octobre. Tous les jours de 10 h à 17 h 45, 7,50 euros, gratuit pour les moins de 18 ans. Livret-jeu pour les 9-13 ans. Visites organisées du musée Curie et des lieux où ont travaillé les Curie dans le 5e arrondissement. ** L’histoire de cette reconstitution est racontée dans le livre « l’Expérience retrouvée », espace des Sciences de Paris-Belin, 15 euros.
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