C' EST un comble : des jeunes gens se font fait un piercing de l'oreille pour des raisons esthétiques et peuvent se retrouver avec de vilaines séquelles du type oreilles en chou-fleur ou autre. Trois observations publiées dans le « BMJ » rappellent le risque infectieux qui existe lorsque le cartilage est atteint, ce qui est notamment le cas dans les piercings qui concernent le tiers supérieur du pavillon.
La première histoire est celle d'un jeune homme de 16 ans qui se présente aux urgences de l'hôpital pour un gonflement douloureux du pavillon de l'oreille gauche, survenu deux jours après un piercing haut situé. La partie supérieure du pavillon est rouge et fluctuante. Il existe un abcès sous-périchondral d'où : incision et drainage sous anesthésie générale ; ciprofloxacine ; pansement compressif pendant deux jours ; sortie sous antibiothérapie orale. Trois mois plus tard, l'oreille est peu déformée.
Oreille en chou-fleur
La deuxième histoire est celle d'une jeune femme de 21 ans adressée en ORL pour une périchondrite extensive du pavillon de l'oreille droite, survenue une semaine après piercing transcartilagineux. Avant l'hospitalisation, elle a été traitée par antibiotiques oraux, sans grand succès. A l'examen, il n'y a pas d'abcès franc et on traite par antibiothérapie I. V. Malgré cela, un abcès se forme, d'où incision, drainage et pansement compressif. Trois mois plus tard, il existe des séquelles à type d'oreille en chou-fleur, avec disparition du cartilage à la partie supérieure du pavillon.
La troisième histoire concerne une jeune femme de 23 ans adressée par son généraliste pour de multiples et laides lésions du pavillon de l'oreille droite, desquelles sort parfois du pus. Elle a eu, cinq mois auparavant, de multiples piercings transcartilagineux. Elle explique que les plaies n'ont jamais cicatrisé malgré l'ablation des anneaux quatre mois auparavant. A l'examen, on note trois vilaines lésions touchant toute l'épaisseur du pavillon. A la demande de la patiente, on excise les lésions chirurgicalement. En peropératoire, ces lésions apparaissent granulomateuses, signant une inflammation chronique, et sont associées à des érosions cartilagineuses. Le résultat esthétique initial est satisfaisant mais, à long terme, avec la cicatrisation, apparaissent des encoches.
A travers le cartilage
Le piercing est fréquent ; le piercing multiple est de plus en plus à la mode, entraînant souvent un piercing haut situé, ce qui implique la ponction à travers le cartilage du tiers supérieur du pavillon. A ce niveau, l'infection entraîne une périchondrite auriculaire. L'infection des tissus mous est une complication bien connue ; l'abcès sous-périosté associé à la périchondrite conduit souvent à une vilaine déformation appelée oreille en chou-fleur. On a également rapporté des cas de choc endotoxinique.
L'infection transcartilagineuse progresse rapidement, ce qui implique une prise en charge agressive.
Les problèmes esthétiques à long terme proviennent de la destruction du cartilage qui forme le squelette de l'oreille. « Il est donc important de reconnaître les signes précoces de la périchondrite - chaleur locale, rougeur, douleur - avant l'apparition du gonflement. » Si la périchondrite progresse, il se forme un abcès.
A la phase précoce de l'infection, le traitement doit viser à éradiquer Pseudomonas aeruginosa et S. aureus. La ciprofloxacine est efficace sur les deux germes. Le patient doit être gardé en observation dans un service d'ORL au cas où il ne répondrait pas au traitement. L'intervention s'impose dès les premiers signes d'abcès.
« Les médecins devraient être vigilants pour intervenir précocement et de façon agressive pour prévenir les séquelles esthétiques considérables qui surviennent habituellement chez des sujets jeunes qui se sont fait faire un piercing de l'oreille principalement pour des raisons esthétiques », concluent les auteurs.
Junaid et coll. (Cardiff et Londres). « BMJ » du 14 avril 2001, pp. 906-907.
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