Homme de Sarko ? « L'image me va bien, je l'assume » (S.Toubon)
«TIENS, c'est Philippe Juvin qui représente Nicolas Sarkozy. Qui est-ce? Je m'attendais à voir Xavier Bertrand», s'est étonné un médecin lors d'une table ronde politique sur la santé.Longtemps inconnu du corps médical, exception faite du monde des urgentistes – ses prises de position, sur le forum de l'Amuf, font parfois controverse –, Philippe Juvin parvient progressivement à se faire un nom. Avec l'aide de Nicolas Sarkozy : c'est lui, le chef des urgences de l'hôpital Beaujon, que l'aspirant à l'Elysée a chargé de bâtir le programme santé de l'UMP. C'est lui, encore, que Nicolas Sarkozy a soutenu pour conquérir la mairie de La Garenne-Colombes, en 2001. En 2004, Sarkozy le propulse vice-président du conseil général des Hauts-de-Seine.
Son ascension politique rapide attise les jalousies, et fait dire à certains que Philippe Juvin, 43 ans, sera appelé à occuper de plus hautes fonctions si Nicolas Sarkozy est élu.
Ce professeur des universités s'imagine-t-il récupérer un portefeuille ministériel ? En guise de réponse, pas de « J'y pense en me rasant le matin» en forme de clin d'oeil, mais un regard amusé qui ne laisse rien voir du fond de sa pensée. «Je suis prêt à tout», finit-il par lâcher. Cette demi-confidence n'étonne pas son entourage, qui le décrit volontiers comme quelqu'un d'ambitieux. «Il sait ce qu'il veut et fera tout pour l'obtenir», certifie un de ses confrères. Voilà qui étonne un médecin qui a croisé la route du Pr Juvin durant son internat : «C'était un étudiant discret, effacé.» Aujourd'hui encore, le Pr Juvin ne parle pas politique à l'hôpital. «Il ne fait pas de prosélytisme», constate un PH. «C'est un as de la communication, précise néanmoins l'urgentiste Patrick Pelloux. Je ne partage pas du tout sa vision d'un hôpital-entreprise, mais je lui reconnais l'honnêteté intellectuelle de ses idées. On sent chez lui une grande ambition.»
Plus prolixe dès qu'il s'agit de commenter la campagne, le Pr Juvin parle de Ségolène Royal comme d'une «redoutable adversaire», mais il raille sa «politique cosmétique». Le programme santé du PS ne peut que mener à l'impasse, assène Philippe Juvin, sûr de ses idées. Epaulé par une dizaine de collaborateurs, dont le Pr Yvon Berland, ancien doyen de Marseille, le Pr Juvin a tracé les grandes lignes du projet santé de l'UMP. L'idée d'une franchise sur les soins, par exemple, c'est lui. Il refuse l'euthanasie, condamne le cannabis. Juge nécessaire d'éduquer les Français à la santé.
Ces derniers mois, l'anesthésiste-réanimateur enchaîne les congrès médicaux pour défendre ses idées. Tout en menant de front ses carrières, chronophages, de maire et de médecin. Et de père de quatre enfants. «Je suis meilleur à faire de la politique qu'à soigner mes patients», précise le chef des urgences. Son chauffeur minute chacune de ses journées. A ses heures perdues – on les imagine rares –, le Pr Juvin détaille sur son blog* les dernières nouvelles de la campagne. «J'ai la chance d'avoir besoin de peu de sommeil», confie l'intéressé. Voilà au moins un point commun avec Xavier Bertrand. Sans être de grands amis, l'ancien ministre de la Santé et lui ont appris à collaborer et à se répartir les rôles. «Si l'on considère l'équipe de campagne comme un gouvernement, Xavier Bertrand est le Premier ministre, et je suis le ministre de la Santé», décrit Philippe Juvin. «On ne joue pas encore dans la même cour», admet l'anesthésiste, loin de se déconsidérer pour autant : «Mon intelligence me porte partout», dit-il.
Avec Nicolas Sarkozy, Philippe Juvin dit avoir de bonnes relations. Les deux hommes ont des traits communs : même goût pour les joutes orales, même hyperactivité. «Je suis drogué du travail», confie Philippe Juvin. Etre étiqueté « homme de Sarko » ? «L'image me va bien, je l'assume», dit-il tout sourire. En début d'année, pourtant, « le Canard enchaîné » leur a prêté un différend : «Si cette histoire sort, tu es mort…», aurait dit Sarkozy à Juvin à propos d'une sombre affaire au conseil général des Hauts-de-Seine. Mais le nom de Philippe Juvin circule aujourd'hui pour reprendre la présidence du conseil général, preuve, sans doute, que la crise a été surmontée. Seulement, les prétendants à la succession de Nicolas Sarkozy ne manquent pas. «Ça doit grenouiller pas mal pour savoir qui va remplacer le patron: ils sont plusieurs à se disputer la place», observe Catherine Margaté, maire (communiste) de Malakoff et membre de l'opposition au conseil général des Hauts-de-Seine. Philippe Juvin ou un autre membre de l'UMP, pour l'élue communiste, cela ne changera rien : «Cela fait quinze ans que l'opposition se bat contre la droite pour que le département mette plus de moyens dans le champ social. Idéologiquement, nous ne pouvons nous entendre».
* Blog de Philippe Juvin :http://juvin.typepad.fr/
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