REFERENCE
Les allergies alimentaires en augmentation
« Les urgences allergiques ont été multipliées par cinq en cinq ans. » Les causes semblent liées au phénomène de l'industrialisation de notre société et surtout de nos habitudes alimentaires.
En effet, la fréquence des allergies alimentaires a doublé en cinq ans. En France, la prévalence de l'allergie alimentaire est actuellement évaluée entre 2 et 3,8 % dans la population générale. Chez l'enfant, elle est estimée à environ 8 %.
La fragilisation des individus dans nos sociétés modernes « surprotégées » due aux modifications rapides de notre environnement (pollution atmosphérique, stress, surmédication) explique aussi cette augmentation des allergies.
La grande majorité des manifestations allergiques sont provoquées par des aliments appartenant à huit groupes : arachide (cacahuète), soja, fruits à coque, lait, œufs, poisson, crustacés et blé. Parmi ces allergies, environ 80 % des cas sont reliés à une consommation d'arachides, de lait ou d'œufs chez les enfants. Chez les adultes, on trouve surtout l'arachide, les noix, le poisson et les crustacés.
Plus de 98 % des antigènes alimentaires sont neutralisés avant de franchir la barrière de la muqueuse gastro-intestinale. Par ailleurs, on connaît la fréquence d'allergies succédant à une sensibilisation respiratoire soit aux mêmes allergènes (asthme professionnels aux protéines alimentaires), soit à de nombreux pollens.
On sait que des sujets allergiques à un aliment peuvent réagir à des doses infimes, de même que le fœtus puis le nourrisson respectivement in utero via le liquide amniotique et le lait maternel.
Rappelons brièvement que les réactions allergiques alimentaires impliquent plusieurs types de réactions, dont les réactions IgE dépendantes induites par l'activation de lymphocytes Th2.
Caractéristiques des allergènes alimentaires
Les allergènes alimentaires sont des glycoprotéines de poids moléculaire de 10 000 à 70 000 daltons, ou des haptènes provenant de l'aliment lui-même.
L'allergénicité est modifiée par des traitements agronomiques, par le stockage prolongé, les technologies industrielles, le chauffage, la fermentation, etc., qui augmentent l'allergénicité naturelle ou bien génèrent de nouveaux allergènes.
Les risques allergiques alimentaires des OGM
Deux exemples mentionnés dans le paragraphe historique de la première partie vont illustrer les risques allergiques causés par des protéines nouvelles que pourraient produire les plantes modifiées.
- L e cas du soja transgénique (1991)
Pour enrichir la plante en méthionine et cystéine, on a incorporé un gène provenant de la noix du Brésil codant pour l'albumine 2s, un allergène majeur, et qui devient un allergène supplémentaire dans le soja.
Ainsi, un sujet allergique à la noix du Brésil pourrait présenter des réactions allergiques après absorption de ce soja transgénique.
L'allergénicité de cet OGM a été mis en évidence par trois méthodes :
- RAST et inhibition du RAST ;
- électrophorèse SDS-PAGE et immunoblots ;
- tests cutanés avec extrait de noix du Brésil, soja transgénique et soja naturel.
Ce soja n'a pas été commercialisé.
- L e cas du maïs transgénique Starlink (automne 2000), protéine de la famille Cry qui contient un gène de résistance à la pyrale du maïs (larve parasite du maïs qui se nourrit des épis encore en formation et fait actuellement des ravages dans les champs de maïs américains). Cette toxine pour larves d'insectes issues de Bacillus thurigiensis, Cry 9c, dans le maïs Starlink est thermorésistante et résiste aux protéases, et une réponse IgE décelée dans un modèle animal n'exclut pas une allergénicité potentielle.
Ce maïs transgénique a fait la Une des médias quand on apprit qu'il aurait pu être incorporé dans des galettes destinées à l'alimentation humaine.
Cette simple suspicion a entraîné le retrait du marché des galettes en question et de l'ensemble du maïs Starlink mis en culture.
Les méthodes d'évaluation de l'allergénicité des OGM
(Rapport FAO/ WHO Rome Janvier 2001 publié dans le numéro 5 d'Alim'Inter de septembre 2001)
Pour les aliments transgéniques, il convient de distinguer trois cas de figures :
1) dans le cas où la source est allergénique (arachide, soja, noisette, lait, œuf, crustacés, poisson, blé...), il est très probable que cette protéine, telle qu'exprimée dans le végétal modifié, conservera son potentiel allergénique. Pour le confirmer, procéder à des tests in vitro sur au moins 14 sérums de patients allergiques dont le taux est
supérieur à 10 Ku/L IgE S. Ce test d'étude a été utilisé dans le cas du soja cité plus haut. Si screening négatif, procéder à un test de résistance par digestibilité par la pepsine qui permet d'évaluer correctement le potentiel allergénique d'une protéine alimentaire ;
2) si le transgène n'a aucun passé d'allergénicité et que, par conséquent, on ne dispose pas de sérum test, rechercher une éventuelle réactivité croisée avec les allergènes du même groupe. Ainsi, on procède par comparaison aux allergènes connus (recherche d'une analogie de séquence portant sur au moins 8 acides aminés contigus. Un seul résultat positif correspondant à une protéine exprimée présente un risque allergique ;
3) dans le cas de nouveaux OGM, éviter l'apparition de nouveaux allergènes dans les OGM de 2e génération.
L'ingénierie génétique est appelée à remplacer les techniques d'hybridation, relativement limitées à des variétés proches, et qui avaient leurs risques propres inconnus du public en général. Les travaux de ces dernières années permettent de dévoiler comment les techniques nouvelles modifient l'allergénicité des aliments. La surveillance du risque allergique des aliments est indispensable étant donné la fréquence grandissante des allergies alimentaires.
« Dans un futur assez proche, cette biotechnologie conduira à la mise au point de matériels alimentaires qui permettront une immunothérapie spécifique prometteuse pour le traitement des allergies alimentaires et peut être d'aliments hypoallergéniques ».
Références :
D. A. Monneret-Vautrin. « Bulletin Académie de Médecine », 2003.
P. Molkhou. Allergies alimentaires chez l'enfant. « Encycl Méd Chir » - Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS Paris AKos Encyclopédie Pratique de Médecine 2002.
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