« TOUTE PERSONNE majeure faisant état d'une souffrance ou d'une détresse constante insupportable, non maîtrisable, consécutive à un accident ou à une affection pathologique, ou lorsqu'elle est atteinte d'une maladie dégénérative incurable, dispose du droit de recevoir une aide pour se retirer dans la dignité. Cette aide active à mourir ne peut être prodiguée que par un médecin et uniquement si la personne a pu en exprimer la volonté claire », peut-on lire (article 4) dans la proposition de loi relative au « droit de se retirer dans la dignité », dénommée « loi Vincent Humbert ». Plutôt qu'une légalisation de l'euthanasie, le texte propose d'inscrire dans le code pénal une « exception d'euthanasie ».
Objectif 100 000 signatures.
C'est Marie Humbert, la mère du jeune tétraplégique décédé il y a un an, qui a symboliquement apposé la première signature à une pétition en faveur de cette « proposition de loi d'initiative populaire » élaborée par l'association Faut qu'on s'active ! (www.fautquonsactive.com). L'objectif de cette initiative est de recueillir 100 000 signatures afin d'inciter des parlementaires à déposer la proposition de loi devant l'Assemblée.
Selon Vincent Léna, porte-parole de l'association et adjoint au maire (PS) de Boulogne-sur-Mer, « la mission parlementaire (présidée par le député Jean Léonetti) a fait avancer le débat, mais ne va pas assez loin ». Le Dr Jean Cohen, président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (Admd), a également signé la pétition, comme d'autres personnalités telles que les acteurs Bruno Solo et Richard Bohringer, les écrivains Viviane Forrester et Benoîte Groult et la médiatique Geneviève de Fontenay. « Cette proposition de loi est quelque chose que tout le monde peut comprendre. Elle est honnête, a commenté Marie Humbert. La question est posée : pourquoi n'avons-nous pas le droit de choisir notre mort ? »
Le 24 septembre 2003, Marie Humbert avait injecté une dose de barbituriques à son fils de 22 ans pour tenter de l'aider à mourir comme il le réclamait depuis un accident de voiture qui, trois ans plus tôt, l'avait laissé tétraplégique, muet, presque aveugle. Son acte avait échoué et, le 26 septembre, le Dr Frédéric Chaussoy, chef du service de réanimation du centre héliomarin de Berck-sur-Mer (Pas-de-Calais), où se trouvait Vincent Humbert, administrait au jeune homme une injection mortelle. « J'espère de tout mon cœur ne pas ouvrir un jour la télévision et entendre qu'une mère a été obligée d'aider son fils. Croyez-moi, c'est quelque chose d'épouvantable, d'inhumain », a commenté Marie Humbert. « Pour moi, cette loi est un peu ce que Vincent aurait souhaité », a-t-elle ajouté.
Une solution intermédiaire.
Le Dr Jean Léonetti, qui a présidé les travaux de la mission parlementaire sur l'accompagnement en fin de vie (« le Quotidien » du 1er septembre) s'est dit tout d'abord profondément ému devant l'émotion de Marie Humbert. « Au sein de la mission, nous avons voulu travailler dans la sérénité afin de concevoir un texte pour tout le monde. La loi est universelle et s'inscrit dans le temps », a rappelé le député (UMP) au « Quotidien ». La proposition de loi qui a découlé des travaux de la mission est, selon lui, « une solution intermédiaire », plus « pragmatique », pour « concilier le respect de la vie et de la dignité humaine ». « Je regrette que notre proposition ne soit pas assez lue. C'est une loi des droits des malades », a indiqué le cardiologue. Selon l'article 1 de la proposition de loi, les soins médicaux ne doivent pas faire l'objet d' « une obstination déraisonnable, lorsqu'il n'existe aucun espoir d'obtenir une amélioration de l'état de la personne et qu'ils entraînent une prolongation artificielle de la vie ». « L'arrêt ou la limitation de traitement ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale (...) et sans que la personne de confiance, ou la famille ou un proche, ait été consulté », précise l'article 4. Les médecins devront prendre en compte, dans certaines conditions, le refus d'un traitement, réitéré par un patient qui n'est pas en fin de vie, même si cela met sa vie en danger.
Le projet définit des procédures différentes selon que les malades sont conscients ou pas. Dans ce dernier cas, le médecin doit consulter une « personne de confiance, la famille » ou d'éventuelles « directives anticipées » rédigées moins de trois ans auparavant par le patient.
Mais cette proposition de loi « n'aide en rien les gens comme Vincent, qui était loin d'être en fin de vie », a déploré Marie Humbert. Pour le Dr Léonetti, « cette loi doit éviter à d'autres mères de se trouver dans une telle situation d'impasse. La façon de se sortir de la mort n'est pas de tuer », a t-il expliqué. Nous voulons aménager un droit à « laisser mourir », a-t-il souligné.
Le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy, a réaffirmé son soutien au texte de loi issu des conclusions de la mission parlementaire et a indiqué qu'il serait mis « le plus tôt possible » à l'agenda de l'Assemblée.
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