Un entretien avec le Pr Bertrand Coiffier*
Déjà mieux codifié grâce à l'élaboration récente d'une classification internationale, le diagnostic des lymphomes s'est enrichi d'une nouvelle technique : le PET-scan. Celui-ci apparaît surtout intéressant pour évaluer la réponse au traitement et donc le pronostic. Il permet en effet de mieux distinguer les réponses partielles des réponses complètes avec images résiduelles. Son emploi reste cependant encore limité pour des raisons de coût et de disponibilité, d'autant que le PET-scan est encore, au moins pour l'instant, un examen complémentaire qui ne saurait remplacer l'imagerie traditionnelle et notamment le scanner.
Il existe également une recherche croissante sur les analyses par microarray (biopuces), qui conduisent à l'établissement d'une carte génétique et permettront peut-être la mise en évidence de certains gènes liés au pronostic.
Des anticorps nus ou radiomarqués
L'approche thérapeutique a elle aussi considérablement évolué. Après l'introduction du CHOP en 1975 et l'intensification thérapeutique permise par les autogreffes dans les années 1980 entraînant, globalement, une guérison dans la moitié des cas, un troisième tournant s'est opéré grâce à la mise au point d'anticorps monoclonaux réagissant avec des antigènes spécifiques. C'est notamment le cas du rituximab (MabThera), anticorps chimérique murin/humain dirigé contre l'antigène CD20 exprimé sur 95 % des cellules B malignes. Beaucoup d'autres anticorps monoclonaux de ce type sont en cours de développement (anti-CD 22 par exemple), ou plutôt réservés à d'autres hémopathies, comme l'alemtuzumab (anti-CD52, Mabcampath) pour la leucémie lymphoïde chronique, le gemtuzumab (anti-CD33, Mylotarg) pour la leucémie aiguë myéloïde, ou à des tumeurs solides (Herceptin). De nombreuses évaluations ont également été faites avec des anticorps radiomarqués comme Bexxar ou Zevalin, mais qui n'ont pas encore l'autorisation de mise sur le marché en France. Dans ce cas, le mécanisme d'action est celui d'une radiothérapie spécifique et ciblée.
L'expérience acquise aujourd'hui avec le rituximab a montré un gain d'efficacité très net. D'abord indiqué dans les lymphomes folliculaires chimiorésistants ou à partir de la deuxième rechute suivant la chimiothérapie, il est maintenant aussi utilisé pour le traitement des lymphomes agressifs en association avec la chimiothérapie, augmentant ainsi la survie à 3-5 ans d'environ 15 à 20 %. Cette efficacité s'exerce avec un confort notable pour le patient puisque les effets secondaires sont relativement bénins, sous réserve de l'observation rigoureuse des précautions d'utilisation du produit, à savoir essentiellement une perfusion lente (sur six heures).
Il reste que tous les malades ne répondent pas au rituximab. C'est le cas de ceux atteints de formes agressives de lymphomes non hodgkiniens, d'où l'intérêt de l'association à la chimiothérapie. Dans le lymphome de Hodgkin, où seulement un tiers des lymphocytes sont porteurs de l'antigène CD20 et où, dans la mesure également où la majorité des malades peuvent espérer une guérison grâce à la chimioradiothérapie, les anticorps monoclonaux n'ont pour l'instant pas démontré d'intérêt supplémentaire. De plus, s'il est tout à fait possible de réitérer les cures de rituximab, dans la majorité des cas, il n'y plus de réponse thérapeutique après trois ou quatre cures, parfois en raison de la perte du récepteur CD20, mais aussi parfois du fait d'une résistance de mécanisme encore inconnu. Enfin, les lymphomes à cellules T demeurent encore les moins bien lotis en matière de progrès thérapeutique, puisque non encore accessibles à aucun anticorps monoclonal, surtout du fait de leur très grande hétérogénéité antigénique.
Si ces dernières avancées apportent un bénéfice incontestable à la fois sur la survie et la qualité de vie des patients, il est également indéniable qu'elles vont de plus en plus compliquer la tâche du praticien qui, dans un proche avenir, sera vraisemblablement conduit à demandé l'aide d'un « surspécialiste ».
* Centre hospitalier Lyon-sud,Hospices civils de Lyon.
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