Editorial

Perdre du poids pour rompre le cercle vicieux

Publié le 18/06/2015
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Les complications cardiovasculaires sont la principale cause de mortalité des obèses. L’obésité, en entraînant une surcharge volumétrique, associée à une surcharge barométrique en cas d’hypertension artérielle (HTA) et à une atteinte myocardique spécifique, génère une hypertrophie ventriculaire gauche qui a des conséquences délétères sur la fonction diastolique, avec une diminution de la relaxation et de la compliance ventriculaires gauches, à l’origine d’un remodelage auriculaire gauche anatomique et électrique. Associé aux anomalies du système nerveux autonome, notamment en cas de syndrome d’apnée du sommeil obstructif, ce remodelage favorise la survenue d’une fibrillation atriale (FA), à l’origine sur ce terrain de poussées d’insuffisance cardiaque (IC) à fraction d’éjection préservée.

Seule une réduction pondérale peut rompre ce cercle vicieux. Celle induite par la chirurgie bariatrique est à l’origine d’un remodelage inverse ventriculaire gauche (1), avec une diminution de la masse et des épaisseurs pariétales associée à une amélioration de la fraction d’éjection et du rapport E/A, mais également auriculaire gauche, avec une diminution du diamètre, et ventriculaire droit, avec une réduction du volume télédiastolique associée à une baisse des pressions artérielles pulmonaires. Ces effets, ainsi que les modifications électrocardiographiques induites par la perte de poids (2), favorisent le maintien du rythme sinusal après réduction d’une FA (3) et améliorent la fonction diastolique ventriculaire gauche. Les résultats de l’étude LEGACY (4) confirment les bénéfices de la perte de poids induite par les mesures hygiénodiététiques, à condition qu’elle soit constante et régulière, sur la récurrence de la FA. Ainsi, la perte de poids, en diminuant l’hypervolémie induite par l’obésité et en étant associée à une diminution de la pression artérielle systolique, réduit à la fois la pré- et post-charge ventriculaires gauches diminuant les contraintes pariétales à l’origine d’un effet antiremodelage à la fois ventriculaire et auriculaire. De plus, en diminuant l’insulinémie et les cytokines pro-inflammatoires, elle pourrait avoir un effet myocardique favorable. Enfin, elle diminue l’incidence des troubles respiratoires du sommeil. Ces données doivent inciter à renforcer les mesures non pharmacologiques chez les patients en surpoids présentant une FA. Un suivi diététique régulier s’impose, suivi, en cas d’échec, d’une discussion de chirurgie bariatrique si l’obésité est morbide. Un contrôle du poids doit donc s’inscrire dans la stratégie de prévention de l’épidémie annoncée de FA et d’IC à fraction d’éjection préservée.

CHU Rangueil, Toulouse

(1) Cuspidi C et al. Am J Hypertens 2014;27(2):146-56

(2) Mukerji R et al. Am J Cardiol 2012;110(3):415-9

(3) Abed HS et al. JAMA 2013;310(19):2050-60

(4) Pathak RK et al. J Am Coll Cardiol 2015 Mar 5.Doi:10.1 016/j.jacc.2015.03.002 [Epub ahead of print]

Pr Michel Galinier

Source : Bilan spécialiste