L E 30 août, alors que s'ouvriront les négociations sur la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière, la ministre de l'emploi, Elisabeth Guigou, devrait aborder avec les syndicats la question brûlante du recrutement des infirmières.
Le gouvernement doit en effet trouver d'urgence une solution, s'il veut éviter une pénurie dramatique de cette catégorie de personnels lors du passage aux 35 heures, qui aura lieu le 1er janvier prochain. Déjà, au moins 10 000 postes d'infirmières - voire de 15 000 à 20 000, selon certaines estimations - sont actuellement à pourvoir. La situation risque donc de devenir catastrophique dès l'année prochaine si rien n'est fait. L'exemple des cliniques, qui ont dû faire face à la gestion de la réduction du temps de travail bien avant le secteur public, n'est pas de nature à rassurer, même si les établissements privés sont encore plus mal placés pour recruter, en raison de leurs grilles de salaires nettement plus basses qu'à l'hôpital.
A défaut d'une recette miracle aux effets immédiats, le ministère va lancer une série de mesures destinées à faire venir ou revenir les infirmières dans les hôpitaux. A partir du mois de septembre, une campagne de communication visera les 50 000 infirmières diplômées de moins de 55 ans qui ont cessé d'exercer, souvent pour élever leurs enfants, afin de les inciter à reprendre le chemin de l'hôpital.
Six régions prioritaires
Dans un premier temps seront concernées les six régions qui ont le plus souffert de la pénurie : Pays de la Loire, Picardie, Nord - Pas-de-Calais, Ile-de-France, Champagne-Ardennes, Rhône-Alpes. La campagne sera généralisée à la France entière en 2002.
A moyen terme, le gouvernement table sur la formation de nouveaux bataillons dans les écoles, qui peinent à faire salle comble. L'an dernier, le numerus clausus avait pourtant été relevé de 18 000 à 26 000 places, mais 10 % des places accordées sont restées vacantes. Or on sait qu'il existe un vivier de candidates parmi les aides-soignantes, qui effectuent souvent dans les faits, et de manière très satisfaisante la plupart du temps, les tâches d'une infirmière, mais elles sont souvent recalées au concours, parce que les autres candidates titulaires d'un bac ou issues d'autres filières d'études obtiennent de meilleurs résultats. Afin d'éviter ce gâchis, depuis cette année, 15 % des places dans les écoles d'infirmières sont réservées aux aides-soignantes. Le système, qui existait déjà pour la rentrée 2000-2001 à Paris, à Lyon et à Marseille, a bien fonctionné, selon le ministère.
Autre mesure susceptible d'attirer les candidates et les candidats : l'indemnisation des stages de scolarité obtenue par les élèves infirmiers dans le cadre d'un protocole signé avec le gouvernement au printemps dernier.
Toujours la filière espagnole
Les sommes sont toutefois modestes : 150 F la première semaine de stage, 200 F la deuxième et 250 F la troisième. Des revalorisations seraient aujourd'hui étudiées.
Enfin, le gouvernement travaille sur une convention multilatérale avec l'Espagne, associant les ministères français et espagnol de la Santé, mais aussi les hôpitaux et les cliniques, pour recruter du personnel parmi les 8 000 infirmières au chômage en Espagne (voir aussi « le Quotidien » du 6 juin). Il ne s'agit toutefois que d'une solution d'appoint.
Ces mesures sont diversement appréciées du côté des infirmières. « Il faut des formations d'adaptation à l'emploi pour les infirmières qui ne travaillent plus depuis plusieurs années », précise Yolande Briand, secrétaire générale adjointe de la fédération santé-sociaux de la CFDT, qui voit d'un bon il les pistes évoquées. Elle espère également qu'aboutisse le projet de loi de modernisation sociale qui prévoit la validation des acquis professionnels et offre des perspectives accrues de recrutement.
La CFTC est en revanche très critique. Qualifiant de « pis-aller » les mesures annoncées par le gouvernement, elle demande un plan de sauvetage pour la formation et la promotion professionnelle.
Persuadée elle aussi que « très peu d'infirmières vont vouloir revenir dans une profession sinistrée », la Coordination Priorité Santé annonce un mouvement national de protestation de l'ensemble des personnels hospitaliers pour le 18 septembre.
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