« Si la situation dure pendant des mois, j'arrête de travailler. » Cette affirmation est récurrente dans la bouche des médecins manchois (« le Quotidien » du 20 septembre). La situation en question, c'est un manque croissant de généralistes libéraux dans les zones rurales du département. De 439 en 1998, leur nombre est passé à 423 en 2000, et menace de chuter encore plus si rien n'est fait pour inciter les médecins en place à y rester et pour en attirer de nouveaux. Les conséquences actuelles - carence en remplaçants, vieillissement de la population médicale et saturation en milieu hospitalier - sont préoccupantes.
Pour inverser la tendance, le conseil général de la Manche propose de construire ou de réhabiliter des bâtiments en cabinets médicaux. L'originalité de ces structures : leur pluridisciplinarité. S'y côtoieront des médecins, un chirurgien-dentiste, des paramédicaux (kinésithérapeutes...), une infirmière, et même une assistante sociale. Un secrétariat commun déchargera les médecins des tâches administratives. Le Dr Jean-Claude Lemoine, député (RPR) de Saint-Lô et premier vice-président du conseil général, explique ainsi le but de ce projet : « Nous voulons donner plus de confort d'exercice aux médecins et plus de temps, de façon qu'ils se consacrent aux seuls actes médicaux. »
Par exemple, on proposera aux infirmières de réaliser elles-mêmes les ECG et le médecin n'aura plus qu'à les interpréter. Un gain de temps, certes, mais qui soulève des questions d'ordre déontologique : la responsabilité du médecin est-elle mise en cause en cas d'erreur d'enregistrement ? « Cette pratique est déjà chose courante dans certaines cliniques, alors pourquoi ne pas la généraliser ? », rétorque le Dr Lemoine. On pourrait craindre, en outre, la jalousie des libéraux en place, qui pourraient se plaindre de la « mauvaise concurrence ». « Il n'en est rien, affirme le Dr Lemoine. En fait, nombreux sont les médecins qui se sentiront soulagés, car ils seront épaulés une fois que les cabinets seront mis en place. »
40 % à la charge du département
Chaque canton déficitaire en médecins devrait avoir bientôt une maison médicale. Le département propose de financer 40 % du montant total des dépenses, plafonnées à 2 millions de francs. Le gouvernement s'est engagé à accompagner cette politique. D'une part, en mobilisant le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) permettant l'investissement immobilier. Et, d'autre part, en débloquant une aide forfaitaire pour les temps de secrétariat. « Mais nous espérons encore plus, souligne le Dr Lemoine. Elisabeth Guigou a promis treize mesures supplémentaires (en faveur de la médecine de ville) , portant notamment sur la régionalisation du numerus clausus et l'octroi de déductions fiscales et d'une prime à l'installation. Mais à ce jour, rien n'a été fait. » Les médecins intéressés par le projet peuvent bénéficier d'un week-end dans la Manche tous frais payés, histoire de découvrir la région.
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