A NEW YORK, le baril de pétrole est à 36 dollars. La hausse des prix de l'or noir n'est pas temporaire ; elle dure depuis plusieurs mois. Les pays exportateurs n'ont pas de mal, cette fois, à maintenir la discipline des prix de vente élevés, car la demande est très importante.
Elle l'est aussi pour la plupart des matières premières. Quand on a observé que le PIB (produit intérieur brut) des Etats-Unis représentait 30 % de celui de la planète, quand on a su que l'Amérique est aussi le premier pollueur du monde, on s'est demandé, non sans une inquiétude légitime, ce qui se passerait une fois que les pays d'Asie les plus peuplés, principalement l'Inde et la Chine, atteindraient un niveau de production comparable.
Une hausse inexorable.
Nous y sommes. Avec des croissances de 8 à 10 %, ces deux pays ne sont pas seulement des exportateurs redoutés, ils importent énormément de matières premières, dont les prix montent inexorablement.
Nos dirigeants dont l'esprit est entièrement occupé par le ralentissement économique ont fort peu de disponibilité pour l'autre crise, celle de la croissance du monde en développement. Nous ne sommes nullement préparés à des restrictions de carburant ou d'acier qui nous feraient passer d'une expansion trop lente à une récession assurée.
Il ne s'agit pas d'un problème que l'on peut régler de façon conjoncturelle. Il faut s'y prendre longtemps à l'avance si nous voulons que notre économie ne subisse pas de plein fouet les conséquences de la pénurie.
Certes, l'expansion asiatique ne sera pas nécessairement sur une courbe ascendante pendant des décennies, sans désemparer. Mais l'Inde et la Chine sont appelées à devenir, dans les vingt ans qui viennent, des pays fortement industrialisés et disposant de technologies de pointe. Le rôle de l'Amérique et de l'Europe n'est sûrement pas de les empêcher d'accéder à ce nouveau statut économique et social, mais de franchir de nouveaux caps technologiques dans des secteurs qu'elles sont seules à pouvoir explorer pour le moment.
DE NOTRE INDEPENDANCE ENERGETIQUE DEPEND NOTRE INDEPENDANCE TOUT COURT
Le respect de l'environnement.
Pour passer à ce stade post-postindustriel, il est indispensable d'inclure le respect de l'environnement dans le développement économique. Il est surprenant que le prix des carburants automobiles, qui n'a jamais été aussi élevé, ne donne lieu à aucune protestation, alors que le gouvernement de Lionel Jospin avait dû diminuer la taxe sur les produits pétroliers (Tipp) pour atténuer le choc des prix à l'importation.
L'industrie automobile qui, depuis trente ans, ne cesse d'améliorer la qualité des véhicules qu'elle met sur le marché, ne se décide toujours pas à lancer des projets fondés sur l'électricité ou l'hydrogène. Plus exactement, elle ne parvient pas à trouver un équilibre entre le recours à une énergie non polluante et un prix de vente concurrentiel.
L'énergie non polluante est pourtant inéluctable. Pas seulement parce que nos villes deviennent irrespirables, en traînant leur cortège d'allergies et de maladies respiratoires, mais parce que nous avons besoin d'une alternative urgente au pétrole.
La filière EPR.
Dans la déclaration de politique générale qu'il a prononcée devant le Parlement au lendemain de la formation de son troisième gouvernement, Jean-Pierre Raffarin a annoncé la relance du réacteur nucléaire EPR. La presse ne s'y est guère intéressée. Le sujet est pourtant essentiel. Il fait d'ailleurs l'objet d'une polémique entre ceux qui y croient (les industriels et la CGT, syndicat dominant à EDF) et ceux qui estiment que cette technologie est dépassée. Si le gouvernement poursuit son projet (la première centrale expérimentale coûterait 3 milliards d'euros), il faudra qu'il vainque beaucoup de résistances, notamment chez les Verts, qui veulent mettre un terme à la production d'électricité d'origine nucléaire sans nous dire par quoi remplacer le pétrole et le charbon, affreusement polluants.
Les objections des écologistes ne sauraient être prises à la légère. Il demeure que l'énergie nucléaire est en France un succès, sinon dans l'ex-Union soviétique (Tchernobyl) ou aux Etats-Unis (Three Miles Island). Soixante-quinze pour cent de notre électricité est d'origine nucléaire, avec un niveau de sécurité remarquable.
Si on compte le temps des inévitables débats politiques, scientifiques, technologiques et financiers et le temps de la mise au point du modèle expérimental, on voit que des décisions essentielles pour l'avenir sont à prendre dans l'immédiat. L'adoption d'un système énergétique bon marché et peu polluant assurerait mieux notre indépendance que des effets de manche diplomatiques.
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