Depuis « l’année de la canicule », le médecin généraliste est harcelé. Il est rendu responsable du moindre incident perturbant la permanence de soins, même si l’incident se produit entre les murs de l’hôpital.
Lors de mon installation en 1979, il n’existait pas de système de garde dans mon canton, en Ile-de-France. Médecin généraliste, je savais que je serai de garde 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 (pour mes patients et également pour les pompiers pour les urgences et les accidents de la route jusqu’à l’apparition du SAMU). Cet exercice de la médecine dura quelques années lorsqu’un confrère, doté d’une longue pratique de la médecine générale et d’une certaine notabilité parmi ses confrères du canton, proposa de nous réunir pour créer un tour de garde pour les dimanches. Une amicale vit le jour et, petit à petit, au fil des ans, le tour de garde du dimanche devint celui du week-end, puis également celui des nuits. Une permanence des soins (PDS) fut instaurée pour les nuits, week-ends et jours fériés (durant ses vacances, le médecin dirigeait ses patients vers un ou deux confrères). Le médecin de garde se déplaçait chez le patient et si nécessaire appelait les pompiers, puis le 15 à l’apparition du SAMU, prenait contact avec les urgences et/ou le service hospitalier qui suivait le patient, ou bien recevait à son cabinet les patients pouvant se déplacer. Ce système de garde fonctionna sans anicroche et ceci jusqu’en 2003, année de la canicule.
Cet été-là devant l’encombrement des urgences et l’incapacité, par manque de lits, de traiter correctement les malades, les urgentistes et le gouvernement, pour se dédouaner, ont accusé les médecins généralistes de ne pas avoir assuré avec assiduité, et compétence la permanence des soins et surtout d’avoir eu la désinvolture de prendre des vacances durant cette canicule « imprévue ». Tous deux rendent les médecins généralistes responsables du nombre de décès. Avec le soutien des urgentistes, le gouvernement qui veut restaurer son image, et prétextant une prétendue incompétence des médecins généralistes, impose la création des « maisons médicales de garde » comme seul remède pouvant assurer aux Français une PDS qualifiée. Les PDS créées par les amicales se désagrégèrent et disparurent peu à peu.
De son côté, pour raison économique la Cnam impose une politique de réduction des visites à domicile des patients et chaque médecin a un quota de déplacement à domicile à respecter. Pour la Cnam, les patients doivent se déplacer au cabinet médical sauf cas exceptionnel recensé. On évoque des projets de transport des patients vers les centres de soins par VSL, taxi, voir des petits bus qui feraient des ramassages pour les malades nécessitant une consultation régulière.
Le médecin généraliste est obligé de s’inscrire dans la « maison médicale de garde » pour sa PDS et de diminuer ses visites de patients à domicile. Une nouvelle médecine naît et se fonctionnarise pas à pas.
La permanence des soins a-t-elle obtenu un bénéfice de cette nouvelle organisation ?
Aujourd’hui, messieurs du SAMU et des Urgences, vous attaquez encore une fois, et cette fois-ci devant l’Assemblée Nationale, la permanence de soins assurée par les médecins généralistes ? N’est-ce pas vous qui avez réclamé et participé à la mise au point cette nouvelle médecine que vous critiquez actuellement ? Mais peut-être maintenant souhaiteriez-vous revoir l’existence de la PDS libérale, celle ayant existé avant 2003 ?
Surtout, pourquoi vous en prenez-vous aux médecins généralistes alors que vous savez que c’est l’Etat qui est responsable de votre incapacité à assurer correctement aux « Urgences » une permanence des soins adéquate en diminuant vos effectifs et vos structures hospitalières. Est-il éthique de se rallier au gouvernement contre les médecins généralistes dans l’espoir d’obtenir quelques millions d’euros en plus ?
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