PROFESSEUR DE DERMATOLOGIE (PU-PH) au CHU de Reims, Florent Grange se souvient de ses visites, lorsqu'il était enfant, à son illustre arrière-grand-père, et de la fête organisée en l'honneur de son centenaire, alors qu'il n'avait lui-même que 14 ans. Ce n'est que bien plus tard qu'il découvre l'ampleur de son œuvre médicale et sa richesse intérieure, grâce à son journal intime, à de nombreux écrits et aux témoignages de ses proches. Fasciné par le grand pédiatre, il complète sa documentation en faisant des recherches aux archives et en rencontrant des contemporains de Paul Rohmer.
« Je ne suis pas historien et ce n'était pas toujours facile de travailler aux archives ni d'utiliser tant de documents anciens », avoue le Dr Grange, qui, une fois que son ouvrage est rédigé, l'adresse à plusieurs éditeurs avant d'être finalement retenu par un Strasbourgeois*.
« J'ai voulu comprendre Paul Rohmer, né en 1876 dans une famille paysanne, et que rien ne destinait à la médecine, explique l'auteur, tout en le replaçant dans le contexte de son époque. » A la fin du XIXe siècle, la mortalité infantile dans les campagnes alsaciennes est encore de 25 % ; pourtant, des milliers d'enfants auraient pu être sauvés par une meilleure hygiène et des gestes simples.
A l'origine de la PMI.
Paul Rohmer, qui passe sa thèse à Strasbourg en 1901 puis exerce quelques années en Allemagne, n'oubliera pas ce qu'il a vu dans les campagnes où il a grandi et milite très tôt pour que la pédiatrie intègre à la fois les progrès de la médecine et de la biologie et une éducation pratique et sociale des mères.
De retour en Alsace en 1919, il y crée l'Association alsacienne de puériculture, la première du genre en France. Elle forme des puéricultrices qui partent ensuite à la rencontre des familles. Les résultats de cette politique sont spectaculaires et le modèle alsacien est à l'origine de la création, après 1945, de la Protection maternelle et infantile dans toute la France.
Paul Rohmer fut de tous les grands combats médicaux, en particulier face à la poliomyélite, la tuberculose, le rachitisme et la prématurité. Il dirigea la clinique infantile de Strasbourg jusqu'à sa retraite, en fit l'une des plus prestigieuses d'Europe et publia de nombreux ouvrages, dont un célèbre manuel de pédiatrie avec Robert Debré. Sa mise à la retraite, en 1947, ne l'empêcha pas de poursuivre pendant trente ans ses recherches et ses travaux, notamment en matière de protection de l'enfance et des adolescents.
Avec pour toile de fond l'histoire tourmentée de l'Alsace depuis 1870 et les progrès de la médecine du XXe siècle, cette biographie vivante « rend hommage à l'un des plus grands pédiatres de son temps, parfois injustement oublié, et qui a lutté toute sa vie pour sauver des enfants et assurer leur avenir », résume Florent Grange.
* « Paul Rohmer, une vie au service de l'enfance », par Florent Grange, Le Verger Editeur, Strasbourg, 2005, 240 pages, 20 euros.
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