MICHEL CHASSANG et Jean-Claude Régi à la même table, voilà qui n’arrive pas si souvent : le président de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf), signataire de la convention, et celui de la Fédération des médecins France (FMF), qui voit dans ce texte une «usine à gaz» à revoir au plus vite, ont confronté « leur » bilan de la réforme de 2004, lors d’un colloque à Paris (Xes Auditions de la santé).
Le médecin traitant, pivot des soins, a-t-il amélioré la qualité ? «Non, tranche Jean-Claude Régi. Les professionnels n’ont pas attendu la réforme pour dialoguer. Le médecin traitant et les parcours de soins n’ont rien apporté sinon des circuits obligés et des tracasseries.»
Compromis (Csmf) ou harcèlement (FMF) ?Pour Michel Chassang, en revanche, le parcours de soins reste une «excellente initiative», instaurée de manière «pragmatique» même si la multiplication des exceptions, «pour respecter chaque situation (spécialités en accès direct, urgence...), a compliqué la donne». Le président de la Confédération a deux regrets majeurs : le parcours de soins «n’existe pas à l’hôpital» et le dossier médical personnel, «dernier étage de la fusée», reste virtuel. «Sur la qualité, on est au milieu du gué»,analyse le Dr Chassang .
Le clivage fondamental sur la convention de février 2005 demeure. Michel Chassang défend un «compromis» qui a procuré «de nombreux avantages» aux praticiens (y compris financiers) tout en «structurant» le système de soins. Même si, nuance-t-il, «il faut aller plus vite, plus loin, corriger certaines erreurs et prévoir des mesures d’accompagnement notamment pour les spécialités cliniques».
Jean-Claude Régi ne retient que les effets pervers. «La situation, c’est la surcharge administrative, le harcèlement, des contraintes et une altération du colloque singulier»,déclare le chef de file de la FMF.
Autre interrogation : la maîtrise médicalisée a-t-elle fait ses preuves ? Michel Chassang souligne l’infléchissement «inédit» du rythme de croissance annuel des dépenses de ville (passé de 8 % en 2002 à une tendance actuelle proche de 1,5 %...) et le fait que «tous les postes de prescriptions sont au vert» (même si c’est la baisse des IJ qui a procuré l’essentiel des économies). Pour Jean-Claude Régi, «la maîtrise médicalisée ne s’improvise pas, elle ne peut se faire qu’avec la FMC et une évaluation des pratiques qui ont beaucoup tardé». Plus grave, selon le leader de la FMF : dans un système qui «lie l’évolution des tarifs aux possibilités financières des caisses», la maîtrise bascule vers «l’économique» au premier dépassement constaté.
Le débat, faut-il s’en étonner, n’a pas rapproché les « pro » et les « anti ». Mais sur un point – le mode de rémunération –, il a révélé une évolution parallèle des deux syndicats, encore impensable il y a peu. Certes, la Csmf comme la FMF affirment toujours la primauté du paiement à l’acte, «pierre angulaire» pour Michel Chassang, «élément fondamental» de la médecine libéralepour Jean-Claude Régi. Mais le premier constate que la «diversification a commencé» (astreintes, tâches transversales, forfait ALD) et que le rééquilibrage «est en cours» en lien avec «l’évolution de l’exercice». Quand au second,il estime que d’ «autres formes de paiement peuvent se justifier» et que les aspirations de la jeune génération et la féminisation méritent d’étudier «des rémunérations forfaitaires et des pistes nouvelles». Comme quoi, un débat peut toujours quitter un instant les sentiers battus.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature