Le Père Ubu lui-même n’aurait sans doute pas imaginé un tel plan de bataille. Où l’on voit des généralistes interdits de vaccination dans leur cabinet,… mais réquisitionnés pour aller faire des piqûres ailleurs, et contraints de quitter séance tenante leurs patients pendant que l’épidémie bat son plein. Cherchez l’erreur… Dans cette campagne de prévention, ni les généralistes, ni les pharmaciens n’ont donc été de près ou de loin associés. Passons sur le caractère un peu « soviétique » de la solution retenue à la place. L’ouverture de 1060 centres et le choix d’un conditionnement multidose fleurent bon les années 50, mais avec des relents d’obligation vaccinale qui ne passent plus au XXIème siècle. Il fallait faire vite, bien et au meilleur coût, se défend Luc Châtel, porte-parole du gouvernement. Résultat : une affluence dans les gymnases digne d’un bureau de vote un jour d’élection cantonale !
Plus qu’une faute de goût, la mise hors jeu des acteurs de santé de proximité paraît une erreur stratégique dont la santé publique pourrait être la première victime. Après deux ans et demi d’un parcours sans bavure, c’est le premier faux pas de Roselyne Bachelot. Vu le caractère relativement bénin du virus, on dira qu’il ne prête guère à conséquence. Mais après ce fiasco, quel ministre se risquera à lancer un plan d’envergure, le jour où une infection beaucoup plus méchante pointera le bout de son nez ?
En courcircuitant généralistes et officinaux, les pouvoirs publics se sont en tout cas privés des meilleurs agents de persuasion. Dommage. On aurait également pu imaginer confier aux médecins de famille la définition au cas par cas des personnes prioritaires. Sur la base de recommandations nationales, c’était jouable, et cela aurait permis, par exemple, de vacciner rapidement l’entourage d’un patient immunodéprimé. Face au tintamarre, la ministre a expliqué la semaine passée au Quotidien du Médecin qu’elle n’excluait pas de reconsidérer sa position. Chiche ! A défaut, les généralistes se consoleront en se disant que, pour une fois, on ne pourra pas les rendre responsables de la gestion d’une crise sanitaire…
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