Plombée par une branche maladie exsangue (6,1 milliards d'euros de déficit estimé en 2002) et par une conjoncture morose qui réduit les rentrées de cotisations, la Sécurité sociale est dans une situation « préoccupante », qui va imposer au gouvernement certains choix « difficiles ».
C'est Yves Bur, vice-président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, également rapporteur du PLFSS 2003 sur les recettes et l'équilibre général, qui s'est exprimé en ces termes devant un parterre de cadres industriels et hospitaliers, réunis à l'invitation de l'ESSEC Santé et de l'ACIP (1). Pour le député du Bas-Rhin, « aucune réforme structurelle n'a été engagée » depuis le plan Juppé, ce qui a conduit à un écart croissant entre le rythme d'évolution des dépenses d'assurance-maladie et la hausse du PIB en valeur. Côté recettes, Yves Bur confirme que le gouvernement « écarte pour le moment l'hypothèse » d'une hausse de la CSG. Quant à la prolongation de la durée de vie du RDS (remboursement de la dette sociale), il estime que ce serait une « solution immorale » qui ferait payer les « générations futures ». La marge est donc « étroite » et le risque de « fuite en avant », réel.
Tarif de référence : l'outil de la dernière chance
Pour maîtriser les dépenses de santé qui « continueront d'augmenter plus vite que la richesse nationale », le gouvernement, insiste Yves Bur, veut « partager » la responsabilité. A l'Etat incombe la mise en uvre d'une « vraie politique de santé publique, dont les enjeux sont porteurs d'économies ». Dans certains cas, explique le député, il faut privilégier une position « agressive » pour marquer les mentalités (lors du débat sur le PLFSS à l'Assemblée, Yves Bur a fait voter, contre l'avis du gouvernement, un alourdissement plus fort de la fiscalité du tabac). « Mais les lobbies sont puissants », admet-il. Autre piste : la régionalisation, qui doit permettre de mieux identifier les besoins sanitaires. Mais sur ce point, Yves Bur juge que les régions sont actuellement « frileuses à l'idée de prendre de nouvelles responsabilités dans le champ de la santé », ce qui semble annoncer une régionalisation à pas comptés.
Du côté des professionnels de santé, « ce sont certains comportements qui devront changer », insiste le député. Les unions régionales de médecins libéraux, en promouvant des actions d'évaluation des pratiques, et la FMC sont invités à « jouer un rôle important ». La revalorisation des honoraires, sujet au cur des négociations conventionnelles actuelles, s'inscrit, confirme le rapporteur du budget de la Sécu, dans le cadre d'une régulation « médicalisée », qui ne peut être une coquille vide. « On ne pourra défendre de nouvelles augmentations d'honoraires sans contrepartie en matière de juste soin et de bonnes pratiques », explique-t-il , avant de citer l'exemple des indemnités journalières, « en augmentation de 15 % par an ». « Le partenariat impose des engagements des médecins », a-t-il répété. Il estime au passage que le pari des génériques n'est pas encore gagné, malgré un décollage prometteur. Mais à propos du forfait de remboursement instauré dans le projet de loi Sécu, le député s'est montré prudent, limitant à son tour la portée de cette mesure. « Le tarif de référence sera l'outil de la dernière chance, on veut d'abord responsabiliser les médecins et il faudra apprécier les choses par rapport aux résultats de la prescription », a-t-il résumé.
Appelé enfin à commenter la polémique ouverte par les déclarations de Jacques Barrot sur la répartition des risques (« le Quotidien » des 4 et 6 novembre), le rapporteur du PLFSS a assuré que la « question de fond » posée par la définition du panier de soins serait au « cur du débat » dans les mois à venir. Il faudra trancher « ce qui relève de la santé, de la maladie et du bien-être et qui finance quoi », souligne Yves Bur, qui regrette que le débat ait été « caricaturé » par certaines réactions aux déclarations de Jacques Barrot. « Les choix politiques seront difficiles », a-t-il averti avant d'affirmer que « les Français devront assumer d'une manière ou d'une autre un coût supplémentaire pour leur santé ». Sans entrer dans le détail des solutions à l'étude, il a noté que « le taux d'automédication reste très faible en France ».
(1) Association des cadres de l'industrie pharmaceutique.
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