« MAUVAIS AIR » ou malaria ( mal aria en Italie où la maladie a sévi pendant tout le Moyen Âge), tel est le titre choisi par William Daniels pour l'ensemble des photographies qu'il présente sur le pont des Arts, entre le musée du Louvre et l'Institut de France. Quarante-deux photos pour raconter le quotidien des patients touchés par le paludisme et témoigner du travail des équipes qui, sur le terrain, aident à lutter contre «l'engrenage del'horreur», qui peut conduire en quelques heures à la mort. «Toutes les 30secondes, un enfant de moins de 5ans meurt de paludisme», rappelle le Dr Michèle Barzach, présidente des Amis du Fonds mondial Europe. L'exposition, fruit de deux années de reportage en Afrique et en Asie, sera inaugurée demain par Nicolas Sarkozy, en présence du maire de Paris, Bertrand Delanoë, de ministres français, européens et africains et de nombreux responsables internationaux engagés dans la lutte contre la maladie.
Ce premier événement est le prélude à la semaine de mobilisation organisée à l'initiative des Amis du Fonds mondial Europe avec le soutien du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et celui du partenariat Roll Back Malaria. Il s'agit, selon les organisateurs, de saisir l'occasion de la présidence française de l'Union européenne pour «rendre possible une politique pérenne et efficace».
Les progrès réalisés au cours des dix dernières années permettent aujourd'hui de disposer d'outils efficaces pour la prévention, le diagnostic et le traitement de la maladie : moustiquaires imprégnées, test de diagnostic par microscope, combinaisons thérapeutiques à base d'artémisinine (ACT). Grâce à leur utilisation, certains pays comme l'Éthiopie ou le Brésil sont parvenus à une baisse importante de la mortalité chez les moins de 5 ans, respectivement de 51 et 60 %. Toutefois, le coût de ces outils reste un obstacle dans les régions les plus pauvres. «Le financement et la diffusion de ces moyens sont les nouveaux enjeux de la lutte contre la pandémie actuelle», soulignent les Amis du fonds. On estime à 250 millions le nombre de moustiquaires imprégnées et à 300 millions le nombre de doses d'ACT nécessaires pour couvrir les besoins de la population à risque en Afrique subsaharienne.
Maladie des plus pauvres, le paludisme est aussi une cause de pauvreté. Dans les pays les plus touchés, elle représente 40 % des dépenses publiques de santé, 25 % des dépenses des ménages et coûte chaque année 12 milliards de dollars (8 milliards d'euros) de PIB à l'Afrique subsaharienne, soit 1,3 point de croissance.
Des financements toujours insuffisants.
Un pont, symbole de cette semaine offensive, doit être jeté entre le nord et le sud afin de briser le cercle vicieux. «Décider, c'est vaincre; ensemble faisons du paludisme une maladie du passé», clament les organisateurs, qui ont prévu quatre réunions internationales. La première aura lieu le 9 septembre à l'Assemblée nationale. Les parlementaires du nord et du sud y débattront des besoins de financements et des défis qui restent à surmonter. En dix ans, les budgets alloués à la lutte contre le paludisme ont été multipliés par plus de vingt : ils sont passés de 64 millions en 1998 à plus de 1,3 milliard de dollars en 2007, dont les deux tiers fournis par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. «Pourtant, ces financements demeurent insuffisants, assure les Amis du fonds. Pour lutter efficacement, les besoins ont été estimés à 3,2milliards de dollars par an.»
Le 10 septembre, les différentes coalitions nationales qui existent dans le monde sont conviées à un partage d'expériences pour ce qui constituerait le début d'un grand partenariat. La coalition française, qui rassemble 23 organisations, a été crée en 2006 pour coordonner et optimiser l'action française contre le paludisme. Le lendemain, les acteurs du secteur privé évoqueront lors d'un petit déjeuner-débat, le rôle des entreprises et la nécessité de développer les coïnvestissements (publics-privés). Enfin, lors d'une table ronde à l'Académie des sciences, les chercheurs, en sciences économiques, humaines, sociales, seront chargés d'élaborer des recommandations sur un nouveau mécanisme d'accès aux médicaments antipaludéens pour les populations les plus pauvres.
* Le livre de l'exposition est publié aux éditions Images en Manoeuvres, septembre 2008. Les photos ont reçu plusieurs prix, dont celui de la World Press et le prix Picture of the Year 2008.
Le coût humain
De 1 à 3 millions de morts par an.
De 350 à 500 millions de cas par an.
L'Afrique subsaharienne est la région la plus touchée (90 % des morts et 60 % des cas).
Le paludisme est la première cause de mortalité de l'enfant de moins de 5 ans en Afrique.
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