Cette fois, avec la fraction NDT 1 du Nederlands Dans Theater, compagnie invitée par l'Opéra de Paris, Jiri Kylián a présenté un programme particulièrement équilibré dans sa composition et son inspiration. Seul reproche, entendu de la bouche de spectateurs : une heure de danse, fut-elle à un niveau superlatif, c'est bien peu contre une heure d'entractes, même passée dans un des plus beaux écrins au monde.
Kylián, donc, avec, pour ouvrir la trop courte soirée, sa « Symphonie de Psaumes » de 1978 sur l'uvre chorale et instrumentale de Stravinski inspirée par les « Psaumes de David.
La chorégraphie est d'une absolue pureté formelle et enferme dix couples de danseurs, sans cesse en mouvement, dans le rectangle parfait de la scène, juché de quelques chaises et fermé à l'arrière par un somptueux mur de tapis orientaux rouges. Rien de religieux dans cette abstraite symphonie de corps, mais quelle harmonie et quelle science de la musique dans cette première manière, en laquelle Kylián, pourtant en continuel renouvellement, ne s'est jamais surpassé ! C'est précisément du Kylián d'aujourd'hui (ou presque, la chorégraphie datant de novembre 2000) qu'illustrait « Click - Pause - Silence », la seconde pièce au programme sur une musique de Dirk Haubrich.
Là aussi, sur une scène quasi vide, meublée par un miroir et un téléviseur à la manière d'un studio de répétition, trois danseurs athlétiques et une danseuse se livrent à des mouvements apparemment désordonnés sur un prélude de Bach soigneusement parasité par de la musique électronique. Ces mouvements semblent obéir à une cinétique très cinématographique avec des arrêts sur image, des pauses, des retours. Dans une dynamique radicalement différente, c'est la même beauté formelle qui enchante. La patte et la signature du maître sont aussi dans cette pièce envoûtante.
Danse dans le brouillard
Le troisième volet, « Speak for yourself », signé par l'Anglais Paul Lightfoot, pur produit du NDT dont il est aujourd'hui chorégraphe résident, ne renie pas sa filiation avec Kylián dont il partage la même économie de mouvement et le même génie du timing et s'inscrit à la perfection comme fin de ce programme.
Mêlant subtilement des extraits de la triple fugue finale de « l'Art de la fugue » de J.S Bach à une musique additionnelle de Steve Reich, la base musicale est ici fondamentale en ce quelle dicte la forme d'une pièce totalement abstraite. Un personnage de qui la tête produit un échappement de fumée s'oppose à quatre couples qui évoluent sous un rideau de pluie qui inonde la scène et se mêle à la fumée en un brouillard rendant la danse périlleuse et communique sa douce fraîcheur jusque dans la salle.
Lightfoot trouve le geste juste pour illustrer sans y coller vraiment l'austère contrepoint de la musique et les savants méandres de ces fugues aux voix entremêlées avec un art si complexe. Les éclairages de Tom Bevoort parachèvent la magie de cette pièce créée à La Haye en 1999, et qu'il faudrait certainement voir et revoir pour en apprécier toute la subtilité.
Opéra-Garnier (08.92.89.90.90). Prochain spectacle : « L'Histoire de Manon », de Kenneth MacMillan, du 12 au 27 juin.
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