UN ENFANT atteint d'atrésie de l'oesophage rencontre au cours de sa maladie un gastro-entérologue et, généralement, un pneumologue, un chirurgien, un psychologue et un généticien. Or l'ensemble de ces professionnels de santé ne se rencontrent pas nécessairement entre eux pour échanger leurs connaissances sur cette pathologie. Et pour cause, l'atrésie de l'oesophage est une maladie rare. L'incidence est de 2,43 cas pour 10 000 naissances, avec très peu de variations selon les pays ou dans le temps. Et elle laisse souvent les familles avec beaucoup de questions sans réponse.
C'est pour y remédier que des parents ont créé en 2002 l'Association française de l'atrésie de l'oesophage (Afao), avec comme premier appui un site Internet* qui permet de rencontrer d'autres familles. Aujourd'hui, l'association compte quelque 80 adhérents qui ont tenu récemment leur troisième assemblée générale. Particularité de cette réunion : la participation des spécialistes, membres du conseil scientifique de l'association, pour répondre aux nombreuses interrogations des parents.
« Il y a un grand problème d'information sur cette maladie, déplore Frédéric Armand, président de l'Afao. La plupart du temps, les parents découvrent au jour le jour les symptômes, au détour même parfois de quelques passages aux urgences. » Dans 55 % des cas, l'atrésie de l'oesophage est en effet associée à d'autres malformations, principalement cardiaque, squelettique, ano-rectale, génito-urinaire et gastro-intestinale. Le grand problème de cette maladie est l'absence d'une prise en charge multidisciplinaire, pourtant indispensable. « Les malformations associées sont souvent dépistées très tardivement, alors que l'on se rend compte après coup qu'il y avait des signes d'appel et des symptômes identifiés », confirme Frédéric Armand.
Rares également sont les familles qui, faute d'information, bénéficient d'une consultation génétique. Une démarche pourtant indispensable, selon le Dr David Geneviève (hôpital Necker - Enfants-malades, Paris), pour « connaître le risque de récidive », « améliorer la prise en charge » et parce que « la morbidité est plus élevée quand l'atrésie de l'oesophage est associée à d'autres formes syndromiques ». La cause probable de la maladie est la conjonction de plusieurs gènes et de facteurs environnementaux. « Quelques facteurs de risques ont été identifiés, indique le Dr Elisabeth Robert-Gnansia (Institut européen des génomutations, Lyon). On a constaté une prédominance masculine (ratio de 1,49) et un risque plus important chez les jumeaux, les enfants de petit poids de naissance et/ou prématurés, les bébés de mères de plus de 35 ans et de moins de 20 ans, chez les primipares et les grandes multipares. » Dans seulement 2 % des cas recensés, la malformation est imputable aux médicaments pris par la mère, notamment des antithyroïdiens.
Un centre de référence.
Problème respiratoire, problème de croissance, problème de retour à l'alimentation : l'Afao souhaiterait un « carnet de santé spécifique » pour suivre au mieux les symptômes de l'enfant. « En ce qui concerne les pneumopathies, il faut adapter les examens en fonction de la sévérité des symptômes, leur tolérance et leurs répercussion sur le système respiratoire », plaide, par exemple, le Pr Christophe Delacourt (hôpital intercommunal de Créteil). En attendant, pour une meilleure prise en charge, le premier objectif de l'association est d'obtenir la création d'un centre de référence sur l'atrésie de l'oesophage dans le cadre du plan contre les maladies rares. Elle a déjà réussi une étape essentielle : faire se rencontrer les spécialistes.
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