« France boutique », de Tonie Marshall, et « Anything Else », de Woodie Allen

Papotages et radotages

Publié le 04/11/2003

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Tonie Marshall sait sentir l'air du temps, les petites envies et les grosses déprimes de M. ou Mme Tout-le-Monde. D'où le succès de « Vénus beauté. Institut », auquel on peut d'ailleurs préférer « Enfants de salaud ».
Avec « France boutique », on est d'autant plus dans la banalité de la France d'aujourd'hui que le film nous entraîne dans des studios de télévision, mieux ou pire encore, de télé-achat. Facile de se moquer de ces charmantes créatures qui présentent des produits pour supprimer la graisse qu'elles n'ont pas, ou de ces baratineurs pas malhonnêtes qui veulent croire à ce qu'ils vendent. Facile mais rigolo et, grâce à Tonie Marshall et ses acteurs, enlevé.
Là-dessus, on greffe un vaudeville à base de tentation d'adultère et une aventure d'aujourd'hui - la grosse société prête à manger la petite, quels que soient les moyens. Et le tour est joué. On a une comédie de murs, avec répliques écrites, couleurs vives et scènes parfois un peu convenues. L'abattage de Karin Viard, la finesse de François Cluzet, le délire de Judith Godrèche, la gentille folie de Micheline Presle, la mère de la réalisatrice, pimentent l'ensemble et on n'en demande pas plus.
A Woodie Allen, en revanche, on demande autre chose que le radotage d'« Anything Else », intelligemment intitulé en français « Et tout le reste », ce qui dit bien l'ampleur, qui confine à la vacuité, du sujet.
Le réalisateur de 67 ans, dans le rôle d'un écrivain paranoïaque nommé Dobel, passe le relais à un apprenti auteur qui pourrait être son double jeune, joué par Jason Biggs, le héros des affligeants « American Pie ». A longueur de scènes, sur les bancs new-yorkais et dans les allées de Central Park qui forment le décor de ses films, il fait la leçon au jeune homme : la vie, la mort, la création, la psychanalyse, l'argent, l'autodéfense, l'amour, le sexe, le sexe, le sexe. Il y a bien sûr quelques répliques qui font mouche mais même les meilleures ne surprennent pas tant Woody Allen met ses pas dans ses pas, se copie, se répète. Seule la nonchalance de Christina Ricci fait passer un peu de fraîcheur.
La déception n'empêchera pas de courir voir l'an prochain le film suivant de notre paranoïaque préféré, qu'il devrait présenter, comme c'est désormais la tradition. On y retrouvera Jason Biggs, avec notamment Chiwetel Ejiofor et Chloe Sevigny...

Renée CARTON