Le pédiatre de garde est appelé de toute urgence au bloc obstétrical. Les choses vont mal : le travail a duré très longtemps ; l'obstétricien est en train d'extraire l'enfant aux forceps ; les deux parents sont chirurgiens-vétérinaires. La scène est familière. La mère, les pieds dans les étriers, est en sueur. A sa tête, le père, perché sur un tabouret, n'est pas très à l'aise. A l'autre extrémité, l'obstétricien officie. Le pédiatre vérifie le matériel de réanimation. Le bébé est extrait. C'est une fille, totalement atone. Au silence de l'enfant répond le silence du bloc.
Alors que le pédiatre s'occupe de la fillette, il sent la présence du père derrière son épaule. La petite se met à crier. Le soulagement général est tangible. Le corps de l'enfant devient bien rose, à mesure que ses poumons respirent. Mais par endroits, sur sa figure et sur sa tête, des marques bleu foncé. Le traumatisme lié au forceps ferme son oeil gauche. La mère : « Est-elle jolie ? » Surpris par la question, le pédiatre et le père se regardent puis baissent les yeux vers le bébé grimaçant. Le père aurait dû réfléchir un peu plus longtemps avant de donner une réponse plus appropriée que celle qu'il fait et qui va le hanter : « Je préfère les petits agneaux. »
« BMJ » du 31 juillet 2004, p. 287.
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