L ES érythrocytes infectés par P. falciparum adhèrent à une variété de récepteurs de l'hôte, y compris le CD36, qui sont largement exprimés au niveau de l'endothélium vasculaire, des plaquettes et des leucocytes. L'adhésion des érythrocytes infectés au CD36 pourrait être bénéfique pour la survie du parasite.
Un déficit en CD36, par mutation pro-90-ser, est fréquente chez les Africains. L'équipe d'Arnab Pain (Oxford) a imaginé que des mutations du gène de CD36 pourraient conférer une protection contre le paludisme sévère. Les chercheurs ont donc séquencé l'ADN de deux Afro-Américains qui n'exprimaient pas le CD36 sur leurs plaquettes, et ont identifié une mutation T-G en position 188 de l'exon 10, avec codon stop TAG.
Ils ont alors recherché cette mutation chez 693 sujets ayant une forme sévère de paludisme et un nombre équivalent de sujets contrôles. Ils ont recruté des enfants avec paludisme sévère, qui avaient un nombre de parasites supérieur à 2 000/μl. Ces enfants avaient soit un paludisme cérébral, soit une hypoglycémie (< 2,2 mmol/l), soit une anémie (hémoglobine < 5 g/dl), soit une détresse respiratoire. Le groupe contrôle était constitué de primigestes. Tous les sujets ont eu un génotypage pour le gène du CD36. Il est apparu une hétérozygotie pour la mutation T188G chez 17 % des contrôles et seulement 14 % des cas (OR : 0,74). De façon intrigante, la mutation était associée à une protection contre l'anémie, l'hypoglycémie ou la détresse respiratoire mais pas contre le paludisme cérébral.
Pas de protection contre le paludisme cérébral
« Nos résultats montrent que ce polymorphisme T188G influence l'évolution du paludisme. Elle peut influencer directement l'expression de CD36 au niveau de l'endothélium et, ainsi, réduire la séquestration d'érythrocytes infectés », indiquent les auteurs. L'absence de protection contre l'atteinte cérébrale chez les hétérozygotes est à première vue troublante, estiment-ils. Pourquoi ? Les érythrocytes infectés peuvent aussi interagir avec les CD36 des monocytes, des macrophages et des cellules dendritiques. Dès lors, l'absence de protection vis-à-vis du paludisme cérébral pourrait être liée à une altération de la réponse immunitaire des cellules dendritiques.
Dans ce contexte, il faut rappeler que l'étude d'Aitman et coll., (« Nature », 2000) a, au contraire, suggéré qu'une mutation de CD36 accroît le risque de paludisme sévère en général et de paludisme cérébral en particulier. Pris ensemble, ce travail-là et la présente étude suggèrent donc que la mutation T188G de CD36 pourrait avoir un effet complexe, diminuant, d'un côté, la séquestration du parasite et déprimant, de l'autre, la réponse immunitaire.
« Lancet » du 12 mai 2001, pp. 1502-1503.
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