Les journalistes médecins qui ont réalisé en 1998 un premier palmarès des hôpitaux pour le magazine « Sciences et Avenir » ont-ils violé le code de déontologie médicale ? Il appartient au Conseil national de l'Ordre des médecins, qui vient d'entendre différents points de vue sur cette question, de trancher.
Sa décision mettra un point final à une procédure déclenchée il y a un peu plus de trois ans par un médecin dont l'hôpital avait été classé par « Sciences et Avenir » parmi les « moins performants » en matière de chirurgie intestinale. Ce médecin avait estimé alors que ceux des journalistes de « Sciences et Avenir » qui étaient aussi médecins n'avaient pas respecté, en élaborant leur palmarès, les articles 3 (relatif à la moralité), 13 (information), 31 (déconsidération de la profession) et 56 (confraternité) du code de déontologie. Portant plainte devant l'ordre départemental de Paris, où sont inscrits à la rubrique médecins non praticiens les deux journalistes en cause, il avait obtenu l'appui de cette instance avant que l'affaire fût jugée par le conseil régional d'Ile-de-France.
En s'associant à la plainte, l'ordre départemental n'avait retenu que les contraventions aux articles 13 et 31. Et en mai 2000, le conseil régional lui avait donné raison : un « avertissement » avait été adressé aux deux journalistes. L'Ordre jugeait que, effectivement, ils n'avaient pas fait état « que de données confirmées », ni « fait preuve de prudence », pas plus qu'ils n'avaient eu « le souci des répercussions de (leurs) propos auprès du public » (article 13). Il estimait qu'ils avaient bel et bien contrevenu à la règle qui veut que « tout médecin doit s'abstenir, même en dehors de l'exercice de sa profession, de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci » (article 31).
A la suite de l'appel des médecins « avertis », l'affaire a été portée, mercredi dernier, devant le Conseil national de l'Ordre. Les deux parties ont une nouvelle fois fait valoir leur point du vue. Pour les plaignants, le palmarès de « Sciences et Avenir » a pu inquiéter le public et nuire à la santé publique. Les journalistes affirment que l'information du public est déontologique et favorise le libre choix du médecin par le patient. Ils défendent aussi la liberté du médecin d'informer à la fois ses confrères et le public sur des défaillances du système sanitaire. L'Ordre tranchera dans un mois.
Depuis 1997, l'équipe de « Sciences et Avenir » publie chaque année des palmarès dans différents journaux. Aucune autre plainte n'a été déposée à l'Ordre. En revanche, les titres pour lesquels ils ont travaillé ont été attaqués au civil : en 1997, la première « Liste noire » publiée par « Sciences et Avenir » avait donné lieu à environ cinq plaintes qui n'avaient pas abouti. L'année suivante, une trentaine de chirurgiens cardiaques avaient poursuivi le même journal en diffamation et obtenu gain de cause. L'édition 1999 du palmarès, parue dans « le Figaro Magazine », n'avait occasionné aucune plainte. En revanche, la ville de Château-Thierry a attaqué l'hebdomadaire en 2000, mais le jugement n'a pas encore été rendu.
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