REFERENCE
Appendice et annexes
Les interventions responsables d'une bride portent le plus souvent sur l'appendice ou les annexes. Le risque d'OIA après appendicectomie est multiplié par 200 par rapport à la population générale, argument capital contre les appendicectomies « prophylactiques » (jadis proposées chez les sous-mariniers).
Les symptômes les plus habituels
Les symptômes les plus habituels sont la douleur plutôt diffuse que localisée, d'installation progressive et d'intensité d'abord modérée. L'arrêt du transit, les vomissements et la polynucléose sont quasi constants. La fièvre, beaucoup plus rare d'emblée, oriente vers certaines étiologies (appendicite, cholécystite, sigmoïdite). Quant à la défense, sa présence est un argument pour opérer sans délai, de même que le début brutal, la douleur ne régressant pas, les signes de souffrance du grêle, cliniques (douleur provoquée localisée, silence abdominal, vomissements fécaloïdes, tympanisme immobile), échographiques ou tomodensitométriques (épanchement intrapéritonéal).
Une étude rétrospective a permis de constater que 15 % des malades se voyaient proposer une intervention d'urgence dans les douze heures qui suivent l'admission. Les autres se répartissent par moitié en succès (disparition des signes, retour du transit, sortie) et échecs (pas d'amélioration clinique ni radiologique et intervention à J4 en moyenne) du traitement conservateur. L'intervention a permis de trouver des brides cordiformes plus souvent que des adhérences serrées, le grêle, étranglé ou volvulé, justifiant alors une résection.
Les malades opérés avec retard
Les complications postopératoires concernent surtout les malades opérés avec retard (16 % de décès dans ce groupe).
Il importe donc de se souvenir que le traitement conservateur ne réussit que dans la moitié des cas et que les malades opérés secondairement ont une morbi-mortalité lourde. Il y a donc sûrement intérêt à ne pas prolonger la surveillance chez un malade dont l'amélioration clinique et radiologique n'est pas franche. Si les adages anciens (ne pas laisser le soleil se lever ni se coucher sur une OIA du grêle) sont contestés, il faut éviter d'intervenir au stade de nécrose obligeant à la résection tout en sachant qu'une intervention trop précoce sur un grêle distendu laisse passer les chances d'une récupération (45 % des cas) sous traitement conservateur.
Intervenir au bon moment
Toute la difficulté est donc d'intervenir au bon moment ; en urgence quand existent des signes de gravité vus. Dans les autres cas, la surveillance sous traitement médical (réhydratation, aspiration, antalgiques) peut s'aider de quelques examens :
- le test à la gastrografine, avec clichés à 4, 8, 16 et 24 h a une excellente sensibilité (98 %) et spécificité (100 %) : si le cæcum est opacifié, on n'opère pas, et inversement. Il a un intérêt à la fois diagnostique et thérapeutique (reprise du transit en 6 heures vs 24 heures en son absence) ;
- l'échographie, quand elle montre une anse dilatée immobile à côté d'une anse plate, est très en faveur de l'étranglement et donc de l'intervention immédiate mais sa valeur prédictive positive n'est que de 73 % ;
- le scanner, du fait de son caractère complet et précis, permettant l'étude des vaisseaux et la perception d'un épanchement, est devenu un examen incontournable en matière d'OIA quand le diagnostic de siège ou de mécanisme n'est pas évident. On peut s'aider de l'opacification digestive (lavement hydrosoluble sous scanner) ou de l'injection de produit de contraste qui vérifie l'intégrité du pédicule mésentérique, rehausse les parois digestives dont l'épaississement avec aspect en cible affirme l'ischémie sans attendre la présence d'air dans le tronc porte. Le cinéscan permet, en remontant du rectum, jusqu'au niveau de l'obstacle, de situer celui-ci à l'union grêle plat-grêle dilaté. Le scanner doit être réalisé dès que possible, car il modifie la stratégie thérapeutique : il permet en effet de voir une infiltration du mésentère, un épanchement du Douglas, voire une ascite de carcinose, une formation tissulaire hétérogène évocatrice de tumeur, des métastases hépatiques, mais aussi la pneumobilie d'un iléus biliaire, l'abcès d'une sigmoïdite, le volvulus de l'anse montée après duodénopancréatectomie, sans compter les pathologies associées (adénome de la prostate).
En conclusion, en dehors des cas manifestement urgents, l'attente est possible avec une surveillance biquotidienne clinique (appréciant aussi le bon positionnement et l'efficacité de la sonde gastrique), et radiologique. Si l'évolution paraît favorable après 24 heures (soulagement de la douleur, absence de fièvre, reprise du péristaltisme, apparition de gaz dans le côlon), on peut poursuivre sans dépasser cinq jours et en étant plus interventionniste après 60 ans.
Prévenir les brides
Une étude sur 362 patients opérés pour OIA a montré que l'ancienneté de l'intervention causale était très variable, de 2 mois à 70 ans. Les interventions réalisées sous coelioscopie exposent peut-être moins aux OIA, mais ce n'est pas démontré, et cinq malades n'avaient que cet antécédent (souvent pour cholécystectomie). Une résection du grêle s'est révélée nécessaire dans un quart des cas, aboutissant à une mortalité globale de 8 % (18 % si résection), particulièrement lourde chez les sujets âgés. Sur 222 patients suivis pendant quatre ans, 29 (13 %) ont été réhospitalisés pour OIA et 12 réopérés.
Ces chiffres inquiétants ont conduit à une réflexion sur les possibilités de prévention des récidives, en limitant la survenue d'adhérences qui compliquent de 55 à 100 % des interventions et sont, outre les OIA, facteurs de douleurs postopératoires et d'infertilité. Parmi ces facteurs d'adhérences, on peut incriminer les interventions majeures, multiples, les plaies du grêle, les hématomes intrapéritonéaux, certaines pathologies (maladies inflammatoires intestinales).
Une cascade
Ces adhérences se font selon une « cascade physiopathologique » : le traumatisme péritonéal entraîne un exsudat fibrineux qui peut se résorber complètement ou non, aboutissant alors à un dépôt de collagène, qui est à l'origine des brides. La formation de brides et d'adhérences est difficile à prouver en dehors d'une réintervention, et la transposition des essais animaux est difficile : par exemple, on sait que la Bétadine est adhésiogène chez l'animal, sans pouvoir extrapoler formellement ces constatations à l'homme. La prévention des dépôts de fibrine a fait appel d'abord aux dérivés héparinés par voie locale ou générale, sans succès. L'absence de suture péritonéale et le soin apporté à éviter les microcorps étrangers (débris de masques chirurgicaux) sont plus efficaces. L'abord clioscopique, qui paraît minimiser les adhérences après chirurgie gynécologique, n'a pas fait sa preuve en chirurgie digestive. La prévention de l'activation de la fibrine fait appel à des « barrières », présentées sous forme de plaque ou de gel sous différentes formes : Goretex, cellulose oxydée, acide hyaluronique (Seprafilm), efficace dans la diminution du nombre de brides, comme cela a été démontré lors des rétablissements de continuité après intervention de Hartmann. En revanche, les tentatives de limiter la réponse inflammatoire (stéroïdes par voie locale ou générale) n'ont pas montré leur efficacité, non plus que les lavages par des quantités importantes de cristalloïdes. Enfin, l'épiploon a un rôle dans la prévention des adhérences et il importe de le respecter quand cela est possible.
Au total, la chirurgie atraumatique, la vigilance vis-à-vis des microcorps étrangers, la non-suture du péritoine, l'emploi de barrières sont d'un intérêt particulier quand le danger d'OIA paraît important : chirurgie du grêle, colo-rectale extensive, chirurgie des occlusions.
Compte-rendu de la journée de l'Association pour la recherche en chirurgie d'Ile-de-France (ARCIF).
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