Diagnostic à 4 ans
Quand Kevin a 4 ans, le diagnostic d'asthme est posé et de la béclométasone 250 mg est prescrite avec chambre d'inhalation (2 bouffées matin et soir) ; la radiographie de poumon est normale et les tests cutanés allergiques (TCA) sont négatifs.
Devant la persistance des symptômes, on modifie son traitement avec fluticasone-salmétérol et montélukast. Malgré tout, mois après mois, Kevin ne va pas bien. Il ne fait pas de sport car il tousse dès qu'il court. Il est souvent fatigué. Il dit avoir le nez toujours bouché. Il n'a pas de problème cutané.
A l'examen, il grandit et grossit correctement, le peak flow est normal à 190 l/min par rapport à sa taille (normale 210 l/min). Il a des sibilants en expiration forcée. D'ailleurs, l'hyperventilation déclenche une toux. Il a une rhinite permanente avec reniflements répétés. Le traitement est réévalué : le montélukast est pris régulièrement, du salbutamol est pris plusieurs fois par semaine en cas de toux. Le traitement par fluticasone-salmétérol est surtout pris quand il tousse (!) et toujours par la bouche directement, sans chambre d'inhalation. Aucun changement sur l'environnement n'a eu lieu. Un bilan médical est effectué : numération formule sanguine normale, immunoglobine E élevée, phadiatop positif, exploration fonctionnelle respiratoire (EFR) normale, TCA positif pour acariens, chat, pollens, bétulacées, fagacées.
Education
Une éducation est faite auprès de Kevin et de sa mère : modification de l'environnement, explication des traitements et de leurs rôles respectifs, plan d'action en cas de crise, projet d'accueil individualisé (PAI) pour l'école. Revu trois mois plus tard, Kevin court, fait du football en bas de chez lui, dort mieux et renifle moins.
La mauvaise utilisation du traitement et la technique d'inhalation inadéquate étaient les responsables de son asthme persistant.
Expliquer
La maladie asthmatique doit être expliquée à l'enfant et ses parents, ainsi que le rôle des traitements ; sans cette étape essentielle, la famille ne comprend pas et n'adhère pas.
Les deux composantes de l'asthme sont expliquées :
1)le bronchospasme: les bronchodilatateurs (B2+) entraînent une amélioration rapide des symptômes, les enfants comprennent vite l'effet bénéfique et utilisent volontiers les B2+. Il faut alors insister sur les modalités de la prise : salbutamol spray toujours avec une chambre d'inhalation quel que soit l'âge de l'enfant (babyhaler jusqu'à 6 ans avec ou sans masque, après 6 ans, l'Aerochamber +, la chambre Vortex... le Volumatic et le Nébuhaler n'existent plus), terbutaline ou salbutamol en poudre pour inhalation à partir de 8 ans en vérifiant que la prise est correcte. Deux bouffées du spray correspondent à une bouffée de poudre ;
2)l'inflammation: coeur du problème que l'enfant et la famille ne perçoivent pas, mais qui est pourtant la clé pour obtenir une amélioration des symptômes à moyen et à long terme. Les corticoïdes inhalés vont diminuer la rougeur, l'oedème de la paroi bronchique, l'hypersécrétion et rétablir un flux ciliaire. Ce traitement ne fonctionne que s'il exerce son action là où il le faut (dans les bronches et non dans la bouche !) et s'il est donné longtemps. Les corticoïdes inhalés seuls ou en association avec des bronchodilatateurs de longue durée doivent être donnés toujours pendant au moins 3 mois. Les prescriptions pour 8 jours ou même 1 mois n'ont pas d'intérêt. On explique qu'il est donné en traitement de fond, que l'enfant tousse ou non. Les produits sont manipulés devant et par l'enfant et des explications sont données avec des codes couleur : produit bleu (comme l'air pur !) pour la toux, la gène respiratoire ; produit rouge ou marron ou violet (comme le « feu » de la maladie) pour aller bien dans les mois qui viennent. Les enfants, contrairement aux adultes, sont très sensibles aux traitements (quand ils sont bien faits), s'améliorent souvent rapidement, le traitement de fond est alors trop souvent abandonné. Il faut poursuivre pendant 3 à 6 mois en recherchant la dose minimale efficace de corticoïdes inhalés.
Le bilan
Le bilan minimal passe par une radiographie de poumon bien de face en inspiration et expiration (éliminer d'autres diagnostics, corps étrangers bronchiques, par exemple), des TCAs à répéter en cas de négativité dans les deux ans, des EFRs pour évaluer l'intensité de l'atteinte asthmatique et son évaluation sous traitement, réalisables facilement à partir de 6-8 ans (avant, pour être interprétables, elles doivent être faites en centre spécialisé pédiatrique). Les EFRs, comme chez Kevin, peuvent être normales chez l'enfant. Leur normalité n'élimine pas le diagnostic d'asthme.
Les traitements pour l'allergie doivent être associés si besoin : Kevin a reçu un antihistaminique, des lavages de nez quotidiens au sérum physiologique et un corticoïde nasal. Le montélukast est proposé, dès 6 ans, en cas d'asthme d'effort et dans les asthmes sévères pour diminuer les doses de corticoïdes inhalés.
Quel que soit l'âge, devant un asthme traité mal équilibré, avant tout changement de traitement, il faut revoir le maniement des médicaments.
Contrôle de l'environnement
Le contrôle de l'environnement est essentiel (50 % du traitement) : arrêt du tabagisme, conseils d'hygiène de vie, arrêt des contacts avec les animaux... Kevin vivait en milieu tabagique et caressait régulièrement le chat de sa voisine...
L'enfant et sa famille doivent apprendre à écouter « les symptômes » : nez qui coule, petite toux, fatigue à l'effort, pour anticiper et donner rapidement et de façon répétée les bronchodilatateurs.
Trois par classe
L'asthme concerne de 10 à 15 % des enfants ; 3 par classe environ.
Maladie fréquente et potentiellement grave, elle est sous-diagnostiquée.
Le diagnostic est simple : dyspnée plus ou moins nette donc pas forcément « crise classique » avec sibilants à l'auscultation ; parfois, chez l'enfant, toux prolongée et répétée sans dyspnée.
Le traitement doit être expliqué, codes couleur à l'appui, son rôle expliqué clairement.
En cas de mauvaise évolution, la technique d'inhalation doit être réévaluée avant de modifier les doses du traitement.
Les CI sont prescrits pour au moins trois mois en recherchant la dose minimale. Attention aux dosages des produits utilisés chez l'adulte beaucoup inadaptés à l'asthme standard de l'enfant.
Le tabagisme passif, voire actif (chez les adolescents), doit être arrêté.
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