Le lien entre alimentation au sein et obésité dans l'enfance ou à l'adolescence reste controversé en dépit d'une littérature riche sur ce sujet. En 2002, un travail publié dans le « Lancet » concluait à une réduction du risque d'obésité dans la petite enfance chez les enfants nourris au sein (voir « le Quotidien », n° 7142 du 9 juin 2002). Deux enquêtes distinctes publiées dans le dernier «BMJ » ne semblent pas, à l'inverse, retenir ce type de lien.
La première de ces études de cohorte a été mise en place à Pelotos, une ville brésilienne de 320 000 habitants ; 2 250 des 3 037 enfants de sexe masculin nés en 1982 ont été suivis jusqu'à l'âge de 18 ans, au moment de leur recensement pour l'armée.
Masse grasse, masse maigre
A cette date, l'examen clinique a inclus une mesure de la taille (assise et debout), du poids, du pli cutané sus-scapulaire et tricipital et une évaluation de la composition corporelle (masse grasse et maigre). Les mères avaient, par ailleurs, été questionnées de façon régulière au moment de la sortie de la maternité, en 1983, 1984 et 1986, afin de préciser le type d'alimentation donn à leurs enfants (allaitement exclusif, alimentation mixte, lait maternisé...).
« Ni la durée totale de l'allaitement, ni le type d'alimentation n'influence de façon significative et constante les indices anthropométriques mesurés à l'âge de 18 ans ou la composition corporelle », analysent les auteurs.
Après ajustement pour des facteurs pouvant introduire des biais tels que le niveau socio-économique, le degré d'éducation maternelle, l'indice de masse corporelle en cours de grossesse, un éventuel tabagisme maternel, le poids de naissance et l'âge gestationnel, seuls les enfants ayant été nourris au sein pendant une période comprise entre 3 et 5 mois présentaient une risque d'obésité à l'âge de 18 ans abaissé de 50 %. En revanche, le risque de surpoids au même âge n'était pas influencé par un éventuel allaitement. L'analyse des différentes mesures anthropométriques n'a, pour sa part, pas retrouvé de lien entre le type d'alimentation et ces paramètres. Enfin, une tendance à l'existence de plus grande taille à 18 ans existe chez les enfants nourris par allaitement maternel exclusif, mais cette notion n'atteint pas la valeur de significativité statistique.
Pour les auteurs, « la baisse de l'incidence de l'obésité chez les enfants nourris au sein de trois à cinq mois après leur naissance, reste difficile à interpréter. En outre, les résultats doivent être contrebalancés par le fait que seuls les garçons étaient inclus dans l'étude et que l'analyse n'a porté que sur 78,8 % des enfants inclus dans la cohorte ».
La seconde étude a, elle, porté sur une cohorte d'enfants britanniques des deux sexes nés depuis 1991 d'un parent ayant vu le jour en 1958. Au total, 2 631 enfants âgés de 4 à 18 ans ont bénéficié d'une suivi. Sur l'ensemble de ces enfants, 62,9 % (soit n = 1 655) avalent été allaités pendant plus d'une semaine par leur mère. L'incidence de l'obésité a été évaluée à 7,9 % dans cette population. En moyenne, l'indice de masse corporelle et le taux d'obésité a été moins important chez les enfants ayant été nourris au sein pendant plus de deux mois, mais ce lien n'est pas statiquement significatif.
Des bénéfices à ne pas oublier
Après ajustement pour les différents facteurs de risque (tabagisme maternel, niveau socio-économique, profession des parents, index de masse corporel parental), aucun effet de l'allaitement ne peut être retenu sur le poids au cours de l'enfance ou de l'adolescence.
Néanmoins, tous les auteurs reconnaissent que ces résultats ne doivent pas tendre à faire abandonner l'allaitement maternel qui reste très bénéfique, en particulier pour les populations à faible revenu socio-économique.
« BMJ », vol. 327, pp. 901-903 et 904-905, 18 octobre 2003.
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