Le nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (nvMCJ) est une maladie acquise, mais manifestement dépendante de facteurs génétiques.
Un premier facteur de susceptibilité avait déjà été mis en évidence, directement, dans le gène prion : il s'agit du génotype homozygote méthionine 129, jusqu'à présent observé dans 100 % des cas (au passage, on note que ce génotype est répandu, puisque porté par 38 % de la population britannique).
Avec la mise en cause du type HLA par l'équipe de John Collinge, au Medical Research Council, c'est donc un second facteur qui apparaît ; facteur qui joue probablement un rôle à une autre échelle que l'acide aminé en 129 de la protéine. Si ce dernier est sans doute important pour comprendre la déformation de la protéine prion native en protéine « scrapie » au contact de l'agent prion, le type HLA pourrait, quant à lui, apporter des éléments sur les mécanismes de l'infection elle-même.
Dans un premier temps, les Britanniques ont procédé à des typages HLA-A, B, C, DRB et DQB1 chez 32 personnes victimes du nvMCJ, 12 personnes atteintes de la forme sporadique de la maladie et, enfin, 197 donneurs d'organe consécutifs. Un écart significatif a été retrouvé au locus DQB1, deux cas seulement du nouveau variant présentant le type DQ7 (DQB1*0301/4/9), contre la moitié des cas de MCJ sporadique et plus du tiers des prélèvements contrôles.
Les molécules HLA DQ7, facteur protecteur
L'étude a donc été poursuivie chez 18 cas supplémentaires de nvMCJ et 14 cas sporadiques, en bornant cette fois le typage au locus DQB1. Au total, le type DQ7 a été retrouvé dans 12 % des 50 cas de nvMCJ, 46,2 % des 26 cas sporadiques et, enfin, 35,5 % des contrôles. Ces résultats suggèrent donc que la présence de molécules HLA DQ7 est un facteur protecteur vis-à-vis du nouveau variant, avec un risque relatif de 3,3 pour les individus non DQ7.
Sous réserve de confirmation par les cas de nvMCJ qu'ils n'ont pas étudiés, les auteurs estiment que leurs résultats pourraient à la fois faciliter le diagnostic, permettre un début de compréhension de la susceptibilité à l'infection et des spécificités des formes acquises par rapport aux formes non acquises.
L'apport diagnostique serait en fait un apport au diagnostic différentiel avec les formes sporadiques. Pour les auteurs, l'intérêt serait de pouvoir accéder directement au marqueur dans le sang, alors que le diagnostic différentiel passe aujourd'hui par une biopsie des amygdales. En fait, il est, pour le moment, peu probable que cette biopsie soit abandonnée ; l'apport diagnostique du typage HLA paraît donc limité.
Un problème de transport
Dans une perspective de recherche, en revanche, le particularisme HLA manifesté par le nouveau variant, par rapport à la forme sporadique, pourrait ouvrir des pistes importantes. On sait que le nouveau variant se distingue des formes non acquises notamment par l'invasion du tissu lymphoréticulaire. Des hypothèses ont été formulées sur la nécessité, pour l'agent prion inoculé par voie périphérique, de se répliquer dans le tissu lymphoréticulaire pour pouvoir envahir le système nerveux. Quelle que soit la validité de ces hypothèses, « l'acquisition » du nouveau variant pose un problème de transport, de l'intestin au tissu lymphoréticulaire, puis vers le système nerveux. Or, l'implication des molécules HLA-II dans ces phénomènes de transport n'a rien d'invraisemblable, bien au contraire.
Autre piste : une réponse immune particulièrement favorable chez les sujets DQ7. Cette piste n'a peut-être pas les arguments de la précédente, puisqu'on n'observe pas, justement, de réponse à l'agent pathogène et qu'il faudrait, par ailleurs, imaginer des phénomènes immunologiques spécifiques du nouveau variant, absents des formes sporadiques. L'hypothèse sera toutefois approfondie elle aussi, puisque, avec l'observation d'un effet protecteur du type DQ7, on peut s'attendre à une multiplication des travaux sur les molécules HLA-II dans le nouveau variant.
G. S. Jackson et coll. « Nature », vol. 414, 15 novembre 2001.
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