La création de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est l'aboutissement de deux réflexions parallèles. D'une part, la volonté de renforcer les contrôles sanitaires concernant les risques nucléaires. D'autre part, le souhait que la recherche anticipe sur la demande d'expertise, souhait inspiré de l'accident de Tchernobyl, où il s'est écoulé dix ans avant que l'Institut de protection et sûreté nucléaire (IPSN) ne soit en mesure d'en présenter les conséquences. La création de l'IRSN doit donc permettre de séparer les fonctions d'expertise, de contrôle et d'exploitation.
Depuis plusieurs années, la radioprotection en France est assurée par deux établissements : l'IPSN, spécialisé dans les recherches sur les accidents, les transports des déchets et la radioécologie, et l'OPRI (Office de protection contre les rayonnements ionisants), chargé de la protection de la population contre la radioactivité. En mai 2000, le gouvernement a donc décidé de réunir l'IPSN et l'OPRI dans l'IRSN. Avec pour objectif la réalisation d'une bonne évaluation de l'ensemble de la filière nucléaire française.
Officiellement créé depuis un mois, l'IRSN n'en est qu'à ses balbutiements. Tout reste à mettre en place ; à terme, il emploiera plus de 1 500 personnes. Pour l'année 2002, il se retrouve doté d'un budget de 250 millions d'euros. Ses missions principales : réaliser des expertises en donnant des avis aux pouvoirs publics sur les risques nucléaires ; mener des activités de recherche ; et surveiller l'environnement, les travailleurs et les sources d'exposition aux rayonnements. L'établissement public est placé sous la tutelle des ministres chargés de la Défense, de l'Environnement, de l'Industrie, de la Recherche et de la Santé. Compte tenu de la divergence des intérêts de ces cinq ministères, la gestion de l'institut rencontrera certainement quelques difficultés, tout au moins au départ.
La médecine sous surveillance
Au total, l'IRSN va surveiller plusieurs dizaines de milliers d'appareils radioactifs dans les hôpitaux ou dans l'industrie classique. Ces sources de contamination concernent 250 000 travailleurs, auxquels il faut ajouter la population exposée, dont les patients font partie. Si on calcule la quantité de rayonnements ionisants reçus par un Français chaque année, on constate que la première source d'exposition est d'origine médicale : elle représente 41 % de l'irradiation reçue.
Les 60 % des rayonnements restant se répartissent de la manière suivante : 34 % des rayonnements proviennent du radon, 11 % des rayonnements des sols, 7 % des rayons cosmiques, 6 % de l'eau et des aliments et 1 % des essais nucléaires ou de l'industrie.
Le secteur médical mérite donc d'être surveillé de près. La transposition en droit français des directives EURATOM 97/43 et 96/29, qui imposent un renforcement de la radioprotection des médecins et patients, n'est toujours pas achevée. « L'application de ces mesures dans les hôpitaux reste largement à faire, souligne Didier Champion, du département de protection de la santé humaine et de dosimétrie de l'ex-IPSN. Ce ne sera pas facile, car cela nécessite du temps et des moyens. Du temps, pour former le personnel et réorganiser le traitement des déchets par exemple. Des moyens, pour adapter les appareils à risques ou investir dans de nouveaux. » Le gouvernement mise sur la réunion des moyens de l'OPRI et de l'IPSN pour résoudre ce problème au plus vite. Rappelons que le délai de transposition des deux directives a expiré le 13 mai 2000.
Le projet de la création de l'IRSN, présenté comme le « leader européen de la recherche », est ambitieux. Notamment par le nombre de recherches qui doivent y être menées, sensées couvrir l'ensemble des sujets concernés par la gestion des risques radiologiques, depuis la technologie des installations jusqu'aux effets des rayonnements sur l'homme et sur l'environnement. Parmi les priorités, l'Institut va mettre l'accent sur la prévention des accidents dans les installations nucléaires. Et au cas où une catastrophe ne pourrait être évitée, les chercheurs vont tenter d'anticiper la situation, en mettant au point le traitement des personnes irradiées et les tests pour mesurer les doses reçues.
Outre l'IRSN, une direction générale de la Sûreté nucléaire et de la Radioprotection (DGSNR) est mise en place. Placée sous l'autorité des ministres de l'Environnement, de l'Industrie et de la Santé, elle assurera les fonctions de l'actuelle direction de la Sûreté des installations nucléaires (veille des installations nucléaires et des transports des déchets), en élargissant ses compétences au domaine de la radioprotection.
* Institut de protection et sûreté nucléaire et Office de protection contre les rayonnements ionisants.
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