EN ANNONÇANT son désengagement des commissions conventionnelles locales et régionales, qui sont les relais efficaces de la maîtrise médicalisée au plus près du terrain, la Csmf a adressé un message fort aux pouvoirs publics, gouvernement compris : «On ne joue plus le jeu.» Le SML est allé encore plus loin sur les conséquences d'une impasse durable sur les tarifs, sans même que les syndicats n'aient besoin de sonner la révolte . «La réaction viendra des médecins eux-mêmes. Ils déserteront la maîtrise médicalisée; le parcours et la coordination des soins qu'ils portent à bout de bras seront vidés de leur contenu. Et il faut être conscients qu'ils n'y reviendront pas. Les dépenses de santé augmenteront à nouveau sans contrôle.»
Le tableau est alarmant alors que l'assurance-maladie affichera encore, selon les prévisions du gouvernement, un déficit de 3,9 milliards d'euros fin 2007. A écouter les syndicats signataires, un échec prolongé des négociations saborderait non seulement la dynamique de régulation médicalisée en ville, dont les résultats sont très encourageants depuis plus d'un an (1), l'organisation des parcours de soins, mais aussi le grand dessein 2007 de la Cnam : donner – enfin – du contenu «médical» au dispositif du médecin traitant. En clair, non seulement les libéraux risquent de relâcher leurs efforts sur les prescriptions, mais la volonté de la caisse d'engager individuellement les médecins traitants dans des programmes de prévention, de santé publique et de coordination des soins (dépistage organisé du cancer du sein, lutte contre l'iatrogénie médicamenteuse chez les personnes âgées, le diabète, la vaccination antigrippale) n'aurait guère de chances d'aboutir dans un contexte conflictuel et de démobilisation générale.
Le discours des soutiens de la réforme et de la convention est d'autant plus préoccupant qu'il s'ajoute au bruit de fond « anti-Sécu » des opposants, qui sont aujourd'hui majoritaires chez les médecins généralistes (60 % des suffrages aux dernières élections). Jour après jour, MG-France, la FMF et Espace Généraliste mettent en cause le «harcèlement» des caisses, les tracasseries administratives qui grignotent le temps médical et la détérioration des conditions de travail des médecins généralistes. Les appels à la «mobilisation» fleurissent au rythme des assemblées générales locales en même temps que des actions de protestation dont il est difficile de mesurer l'impact : cotations CS sur les feuilles de soins, refus d'utiliser l'ordonnancier bizone pour la prise en charge des ALD, refus de recevoir les délégués de l'assurance-maladie, grève de la télétransmission.
Rouages.
Dans ce contexte déjà tendu, le raidissement des signataires et, si elle se confirme, la remise en cause de la gestion paritaire de la vie conventionnelle seraient un coup rude. Le ministre de la Santé ne l'ignore pas qui juge «incompréhensible» la tournure des événements et la détérioration du partenariat caisses/médecins.
Ce sont les commissions paritaires régionales (CPR) et surtout locales (CPL) qui assurent en effet la mise en place «opérationnelle» de la maîtrise médicalisée. Elles s'efforcent de régler les difficultés d'application, analysent l'évolution locale de la consommation des soins, prévoient des actions ciblées dans les départements, établissent les contrats locaux d'objectifs, accompagnent la mise en place des accords de bon usage des soins. Une politique de maîtrise des dépenses a donc toutes les chances de se gripper sans ces précieux rouages. En Ile-de-France déjà, où exercent 25 000 libéraux, les médecins de la section professionnelle de la commission paritaire régionale ont décidé de «ne pas s'engager dans de nouveaux objectifs conventionnels tant que l'Uncam (...) ne respectera pas ses obligations conventionnelles».
En 2006, les dépenses remboursées de soins de ville ont progressé de 2,5 %, taux le plus faible depuis dix ans. La progression des remboursements de médicaments a été inférieure à 1 %. Les versements d'IJ ont reculé de 1,5 %. Mais le mois de janvier 2007 a été plus difficile avec un bond des remboursements en IJ (+ 6,8 %) et des médicaments (+ 4 %) par rapport au même mois de 2006.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature