L’actualisation 2 016 des recommandations de l'EULAR sur la polyarthrite rhumatoïde (PR) publiée en 2017 (1) confirme la place du méthotrexate (MTX) en première ligne et l'intérêt de faibles doses de corticoïdes en adjuvant du MTX.
En cas d'insuffisance de réponse, une trithérapie (MTX, sulfasalazine, hydroxychloroquine) peut être proposée en absence de facteur de mauvais pronostic. En présence de facteurs de mauvais pronostic, les inhibiteurs de JAK sont une alternative aux biothérapies en cas d’échec du MTX ou de réponse inadéquate aux biothérapies. Deux inhibiteurs de JAK, le baricitinib et le tocifacitinib, ont eu un avis favorable pour l’autorisation de mise sur le marché dans le traitement de la PR et devraient être commercialisés en 2018. En deuxième intention, le rituximab en IV peut être intéressant, notamment en cas d’antécédents récents de lymphome, de tumeur maligne ou d’affection démyélinisante du SNC. Faire une première évaluation du traitement de fond à 3 mois, attendre jusqu'à 6 mois avant de changer de traitement si objectif non atteint.
Des résultats d’études
L'étude RA-BEAM (2) comparait l’efficacité clinique et structurale du baricitinib au placebo, et à un anti-TNF, chez des patients atteints de PR active et potentiellement sévère, avec réponse inadéquate au MTX. Le baricitinib s’avère supérieur au placebo et légèrement supérieur à l'adalimumab (et la différence se maintient à 6 mois et à 1 an). Le profil de tolérance du baricitinib est similaire à celui des biothérapies. D’où l’avis favorable du Comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) pour l’octroi de l’AMM du baricitinib dans le traitement de la PR modérée à sévère de l’adulte.
L’étude ENTRACTE multicentrique randomisée de phase 4 comparait la tolérance cardiovasculaire du tocilizumab à celle de l’étanercept (ETN) chez 3 080 patients de plus de 50 ans, atteints de PR active, avec réponse inadéquate à un traitement de fond synthétique et au moins un autre facteur de risque CV que la PR (3). Elle était justifiée par l’augmentation du cholestérol total, du LDL-CL et du HDL-CL, observée chez 15 à 25 % des patients sous tocilizumab. Résultats (tocilizumab vs ETN) : à 1 mois de traitement, le LDL-CL augmente (12 % vs 1 %). En revanche, après 3,2 ans de suivi, il n’y a pas de différence significative sur la survenue d’événements CV majeurs (1,82 vs 1,70/100 patients année), sur la mortalité CV ou globale, ou sur les infarctus. À noter l’augmentation non significative : des AVC (26 vs 16), hospitalisations pour insuffisance cardiaque (12 vs 8 sous étanercept) et perforations intestinales (8 vs 1).
Une étude randomisée de phase III évaluant le SB4 (biosimilaire de ETN) vs ETN chez 596 patients atteints de PR ayant une réponse inadéquate au MTX. Les résultats à 6 mois montrent un profil d’efficacité clinique, de tolérance, et d'immunogénicité du SB4 superposable à celui de l’ETN (4). Les données préliminaires issues de la phase d'extension suggèrent que cette équivalence se maintient à 1 an, mais aussi à 2 ans lorsqu'on remplace l’étanercept de référence par son biosimilaire (5). Au vu de ces résultats, le biosimilaire de l’ETN a obtenu les mêmes indications que l’ETN de référence, à un prix 15 % inférieur.
Biothérapies et risque de cancer
Le risque de récidive de tumeurs solides (sauf cancers cutanés) a été évalué (6) chez des patients atteints de PR. Sur 61 950 patients atteints de PR (registre national suédois), 446 patients ont été identifiés avec cancer diagnostiqué plus de 6 mois avant le début de traitement anti-TNF et comparés à 1 278 patients identiques, non traités par biologiques (contrôle). Résultats (groupe anti-TNF vs contrôle) : début du traitement après le diagnostic de cancer (9,9 ans vs 9,5 ans) ; suivi moyen (4,9 ans vs 4,1 ans), cancers de stade IV (0,6 % vs 1,6 %), récidive de cancer (n = 30,7 % 14/1 000 patients/an vs n = 89,7 %, 17/1 000 patients/an), hazard ratio ajusté : 0,69 (IC 95 % 0,42-1,12), Il n’y a pas de différence en fonction du recul du diagnostic de cancer : hazard ratio pour les patients traités par anti-TNF dans les 5 ans après le diagnostic de cancer identique à celui après 9 ans ou plus : 0,67 (0,31-1,44). Les données manquent en cas de cancer très récent ou de mauvais pronostic.
Sur ce registre, une autre étude (7) a évalué le risque potentiel de cancer sous biothérapies (anti-TNF tocilizumab, abatacept ou rituximab) chez des patients ayant une PR, sans antécédent de cancer. De 2006 à 2014, ont été suivis et comparés, 6 groupes de patients respectivement sous tocilizumab (n = 1 408), abatacept (n = 1 565), rituximab (n = 2 793), anti-TNF première ligne (n = 9 355), anti-TNF deuxième ligne (n = 3 610) et DMARDs. Résultats : le risque de tumeur solide ou hématologique (excluant les cancers cutanés, hors mélanome) est équivalent sous biothérapie et sous DMARDs (population de référence).
Auto-immunité liée à des bactéries intestinales
Deux nouveaux auto-antigènes spécifiques de la PR ont été identifiés : GNS (N-acétylglucosamine-6-sulfatase) et FLNA (filamine A). Ils sont la cible de réponse immune qui pourrait initialement être dirigée contre des peptides du microbiote intestinal, notamment d’espèces Prevotella. L’ajout de ces 2 auto-anticorps spécifiques de la PR au test standard d’auto-anticorps (FR et AAPC) pourrait accroître le pourcentage de patients séropositifs pour la PR (de 69 % à 86 %). L’ajout de l’antigène GNS citrulliné au test de l’AAPC pourrait le rendre plus sensible. Ces marqueurs de diagnostic sont déterminants pour un traitement précoce. Selon les chercheurs, identifier les patients avec des anticorps GNS et FLNA pourrait permettre « de développer des traitements adjuvants, diététiques ou des antibiothérapies ciblées ».
(1) Smolen JS. et al. Ann Rheum Dis. 2 017, Jun;76(6):960-977
(2) Taylor PC. et al. N Engl J Med 201 ; 376 : 652-62.
(3)Giles JT. et al. Arthritis Rheumatol 2 016 ; 68 (suppl 10).
(4) Emery P. et al. Ann Rheum Dis 2 017 ; 76 : 51-7.
(5) Burness CB. et al. BioDrugs 2 016 ;30 :371-8.
(6) Raaschou P et al. Abstract n° OP 0308H.
(7) Wadström et al.. Abstract n° OP0100
(8) Pianta A et al., J Clin Invest. 2017 vol.127(8) pp.2946-2956
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