Décision Santé. Quel bilan tirez-vous de l’implication de la Région dans le secteur sanitaire en Île-de-France ?
Jean-Paul Huchon. Nous n’avons pas à rougir de notre intervention. Le conseil régional s’est lancé dans une politique volontariste de santé, parce que la situation francilienne de l’accès aux soins se dégrade, et que l’État se désengage. Cet engagement régional de près de 100 millions d’euros depuis 2004 a déjà permis de soutenir de nombreux projets et d’adopter des mesures très concrètes, luttant efficacement en faveur de la résorption des carences territoriales en matière de santé. Ainsi, la Région soutient-elle financièrement les maisons médicales de garde, les centres de santé, les maisons de santé pluridisciplinaires.
D. S. Vous avez proposé d'investir un milliard d'euros dans la santé publique, pour pallier en partie les déficits de l'État. N’est-ce pas électoraliste ?
J.-P. H. Soutenir le plan périnatalité aux urgences, est-ce de l’électoralisme ? Aider l’installation des jeunes médecins dans des zones en carence médicale, est-ce de l’électoralisme ? Deux fois non. Je ne crois pas que l’on puisse faire mieux avec moins, comme le propose actuellement le gouvernement. Je préfère répondre aux besoins des Franciliens. La Région Île-de-France investit d’autant plus dans le champ sanitaire et social qu’avec la crise, la précarité grandit et frappe un nombre de plus en plus croissant de nos concitoyens. En six ans, nous sommes devenus un partenaire indispensable de la santé en Ile-de-France. Quand l’ARH vient nous demander de l'argent pour financer ses projets hospitaliers ou l'interconnexion des samus, nous répondons présents. Nous avons toujours été au rendez-vous. En contrepartie, nous voulons aussi être des acteurs décisionnels des politiques de santé. Nous ne pouvons pas continuer à financer des structures qui vont fermer leurs portes six mois après leur ouverture. Nous sommes d’accord pour soutenir financièrement les projets de santé. Mais en échange, nous souhaitons un droit de regard.
D. S. Vous avez pris récemment la défense de la sauvegarde de l'emploi à l'AP-HP. Concrètement, que peut la région dans ce dossier délicat ? De manière plus générale, quelles sont ses compétences en matière hospitalière ?
J.-P. H. J’ai effectivement invité la ministre de la Santé à décréter un moratoire sur la décision prise par le directeur de l’AP-HP de supprimer entre 3000 et 4000 postes. Une telle décision comptable et à courte vue se solderait par une dégradation forte de l’offre de soins, notamment de proximité, pour les Franciliens. Les exemples de l’hôpital pédiatrique Armand-Trousseau et de l’Hôtel-dieu, deux établissements menacés de démantèlement, le montrent bien. Président du conseil régional, je suis devenu un des financeurs de la santé francilienne. Ce rôle nouveau me donne certes des devoirs, mais il me donne également, je le crois, quelques droits, dont celui de lier les enjeux de santé avec ceux de l’aménagement du territoire et de la défense de l’emploi. C’est pour toutes ces raisons que j’ai lancé l’idée d’assises régionales de la santé avec les professionnels, les usagers, les élus, les associations, avant toute prise de décision.
La Région n’a pas à ce jour de compétence dans le domaine de la santé. La loi HPST lui donne une voix seulement consultative dans le conseil de surveillance de la future ARS, et une place pour les élus dans les conférences de santé et d’autonomie qui vont préparer le futur plan régional de santé publique. Cette place n’est pas suffisante. Nous voulons davantage peser sur les décisions de réorganisation hospitalière ainsi que dans l’organisation de l’offre de soins. Si les choix ne correspondent pas à de vrais besoins en matière de santé, à une vraie organisation de la permanence de soins, je l’annonce très tranquillement : nous ne financerons pas ces projets.
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